Sens - Une nouvelle détermination [Ouvert]

L’équipe Delta avait convenu de rencontrer Sauveuse à Pôle Sud, sans Adamas qui avait décidé de rester à l'écart. Quand Madhi avait décidé de la rejoindre au dispensaire, Evangéline s’était littéralement substituée à son ombre, son précieux pistolet soigneusement dissimulé sous sa veste. Elle ne l’aurait laissé seul avec elle sous aucun prétexte.

À peine à l'écart des regards indiscret, la quadria se jeta dans les bras de Madhi et l'embrassa sans retenue. L’infime petit espoir d’une non réciprocité s’envola en narguant Evangéline. Elle avait juste envie de vomir, mais n’en fit rien et resta stoïque. Puis Sauveuse déballa ses explications, les Quadria opprimés, blablabla… Evangéline n’écoutait que d’une oreille mais elle voyait bien que la situation n’avançait pas énormément et Madhi et ses grands airs de Saint Bernard n’arrangeaient rien. Elle décida alors d’intervenir et de proposer son plan : la faire venir à Aquacity en gage de bonne foi et parler de son alliance directement avec leurs supérieurs. Très risqué, il fallait le reconnaître, mais cette opération avait des chances de porter ses fruits… De toute façon, la décision finale appartenait à Finlongfinger, Lyanna, et surtout à Madhi qui craignait pour sa belle, pensa Evangéline. Elle eut un nouveau haut le cœur en repensant à leur étreinte. La petite voix dans sa tête la taquina gentiment et la traita de gamine.
Mais elle lui murmura également que garder le cœur lourd ne lui réservait rien de bon. Quand Evangéline finit d’expliquer son plan à Lyanna, elle se tourna vers Sauveuse.

_"On peut parler, s’il te plaît? Juste toi et moi."

Evangéline avait adopté un ton plus doux que d’ordinaire pour ne pas paraître menaçante. Elle avait réellement envie de parler. Plus qu’une envie, c’était un besoin.


-

Sauveuse inclina légèrement la tête sur le côté, à la manière des animaux de compagnie. Son regard ne trahissait rien, mais cette attitude dénotait sa perplexité.
"Je te suis… (brève hésitation) Evangéline."

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Evangéline entraîna la Quadria à l’écart des autres, mais surtout de Madhi à qui elle avait remis son arme afin de lui prouver sa bonne volonté. De toute manière, la Resplioid était la meilleure des protection en cas d’attaque.

_"J’avais vraiment besoin de te parler. Je..."

Elle se planta devant sa rivale et croisa les bras. Elle cherchait les mots justes, le discours à tenir dans ce cas précis. Au fond, elle savait de quoi cette échange avait l’air, ou bien était-elle la seule à le prendre comme cela.

_"C’était un beau baiser, Sauveuse, mais déplacé par les temps qui courent."

A bas les apparences, elle allait jouer cartes sur table. Peu importe si elle allait paraître pour la jalouse de service.

_"Nous sommes en guerre et tu n’as aucune certitude concernant le camp que tu vas rejoindre. Tu pourrai très bien recevoir l’ordre d’achever Madhi et je ne permettrai pas que tu lui fasses du mal."

Cette fois ci, toute douceur s’était envolée pour laisser place à la pointe de mise en garde qui était de circonstance. Si l’amour était un champ de bataille, elle n’était pas prête à baisser les armes et à se rendre, bien au contraire.

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- "C’est ça qui te préoccupe ? Que je puisse m’attaquer à vous si vous refusez notre alliance ? Tu es naïve Evangéline. Je l’ai dit à Mahdi, je suis une Quadrilla de Rebirth, je ne sais que protéger la Vie. Même si je voulais vous tuer, j’en serai incapable, c’est fondamentalement opposé à notre nature."

Une brève moue traverse les lèvres de Sauveuse. Durant une fraction de seconde, elle semble humaine, irritée. Puis le masque impassible retombe sur les traits de la Quadrilla.

"Quant à savoir qui j’embrasse et quand je le fais… Je crois me rappeler que pour les humains, ça ne regarde que mon amant et moi."

-

_"Pour ce qui est de protéger la vie, permets moi d’en douter, “Quadria de Rebirth”… La mort de Sword me reste encore en travers de la gorge. Cranisten est un des tiens, si je ne m’abuse ?"

Évangéline faisait de son mieux pour garder son calme, mais l’attitude et les réflexions de Sauveuse rajoutaient de l'huile sur une flamme déjà vive. Elle serra les poings. Son visage restait d’une étonnante neutralité mais ses yeux trahissaient aussi son état. Si Madhi n’avait pas été à quelques mètres, la demoiselle à la peau bleue aurait déjà reçu un bouquet de phalanges dans sa jolie gueule.

_"Sauf qu’il est aussi le mien d’amant et que je ne vois pas d’un bon œil votre union. Je ne dirai pas qu’elle est contre nature, mais plutôt déplacée. Ce n’est que mon avis. Je tenais juste à éclaircir certains points… Ne lui fais pas de mal et je ne m’en prendrai pas à toi, après tout j’ai fait une promesse."

Elle lui fit un signe de la tête et commença à lui tourner le dos.

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-" Sword était un accident… C'est Wilfried que Myphos voulait. Nous ne faisions que suivre ses ordres, nous n’avons attaqué les Bugs que parce que nous savions que vos armures vous protègeraient… Kranisten, il… Il portera le poids de cette culpabilité jusqu'à la fin…"

La voix de Sauveuse baisse jusqu'à n'être plus qu’un murmure.

-"Je ne savais pas pour Mahdi et toi. Je ne me mettrai pas entre vous, je te le promets…
Brève pause.
Au fond, tu as sûrement raison. l'union d'un humain et d'une Quadrilla est contre nature…"

-

Évangéline s'arrêta et ferme les yeux. Peut être était-elle allée trop loin. Elle fit de nouveau face à Sauveuse et posa sa main sur une des siennes. Difficile d’imaginer que son interlocutrice portait une armure, elle paraissait si humaine.

_"Merci pour m’avoir dit la vérité, concernant Sword… Même si je ne comprends pas pourquoi Wilfried. Et…"

Elle marqua une pause.

_"Nous obéissons souvent à des ordres qui nous dépassent. Mais j’aime pensé que nous avons toujours le choix. Je dois la vie à quelqu'un qui a vu une enfant au delà d’un ennemi à abattre."

Évangéline se tut à nouveau. Lorsqu'elle abordait le sujet “Madhi”, il lui arrivait de perdre pieds - ou d’aller jusqu'à perdre la tête. Elle se mordit la lèvre inférieure.

_"Entre Madhi et moi c’est compliqué. Je l’aime, il m’aime aussi de ce qu’il m’a dit, mais avec cette guerre c’est… compliqué."

Elle secoua violemment la tête lorsque Sauveuse évoqua sa propre relation avec le concerné. Dans sa façon d’être, Evangéline commença à réaliser que les Quadria pouvaient s’avérer bien plus complexes que les autres prétendaient. Une âme vibrait sous cette carapace, une âme et des sentiments, elle en était persuadée. Elle envoya valdinguer tous ce qui faisait d’elle Evangéline : son masque, son attitude détachée, ses yeux glacés.

_"Oublie tout ce que j’ai dit. Je ne suis personne pour juger de la nature d’une relation entre Quadria et Humains. Si beaucoup d'entre vous sont comme toi, je pense qu’il doit y avoir plus d’humanité chez vous que dans certains individus de ma propre espèce."

Elle ricana doucement et son visage se transforma. Ses traits se détendirent. Il était temps d'agir en adulte. Évangéline avait chaud et étouffait presque. Mais la petite voix dans sa tête exultait de joie. Elle referma ses mains sur celles de Sauveuse.

_"J’aime Madhi et ça me tue de dire ça, mais il y a peut être assez d’amour en lui pour nous deux… Alors s’il doit y avoir un Madhi et Sauveuse, je l’accepterai. C’est tout. Mais en attendant la suite des événements, cache toi et fais attention. Notre chef et Madhi ont une décision à prendre et nous ne la connaîtrons pas avant demain."

-

"Je ne me cacherai pas, Evangéline. Je me suis assez cachée, je suis née cachée. Je me suis cachée pour survivre à la résistance, je me suis cachée quand Finlongfinger et ses troupes nous massacraient. Puis je me suis cachée parmi vous, je me suis cachée de moi-même et de mes sentiments… Alors non, je ne me cacherai pas cette fois-ci. Si je dois mourir à Paris, au moins ce sera en pleine lumière, avec la certitude que j’ai fait ce qu’il fallait. Et d’ici-là, je ne cacherai pas non plus ce que je ressens pour l’autre coureur de jupons…"

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Madhi était perdu dans ses pensées, il n’avait même pas réalisé pourquoi Eva lui avait donné son arme, mais il avait eu un soulagement automatique, réflexe en la voyant lui tendre un instrument de mort, au moins elle ne le portait pas. Il émergea de ses réflexions sur une place vide, face à un mur. Il appuya ses poings contre ce dernier et y apposa son front, respirant un grand coup, puis se frottant les yeux, il avait un sacré mal de crâne.

Il se rendit compte que la place était vraiment vide, les filles n’étaient plus là. Il se mit à les chercher, au détour des ruelles. Madhi venait de comprendre ce qu’il se passait, il eut un brusque arrêt dans ses pas, ça chauffait peut-être, non loin…

Finalement, il réussit à les trouver, il fit son entrée dans une scène à laquelle il ne s’attendait pas du tout. Eva qui serrait les mains de Sauveuse, il n’y avait rien d’agressif dans ce geste, c’était même extrêmement bienveillant. Le visage de Madhi s’illumina, il n’osa pas interrompre la scène, s’appuyant contre le mur le plus proche, il se contenta de regarder la scène avec un sourire béat sur le visage. Les deux femmes qu’il aimait semblaient se confier l’une à l’autre. Il n’osait pas interrompre ce moment magique, il voulait juste l’imprégner dans sa mémoire.

Quand Sauveuse finit sa phrase, il ne put s’empêcher d’avoir un petit soufflement de nez, sachant ce qu’impliquait être un coureur de jupons, il était très mal qualifié pour cela…

“Désolé les filles, j’étais perdu dans mes pensées, j’ai continué tout droit”

Madhi avait complètement zappé qu’elles s’étaient éloignées EXPRÈS, pourtant tout l’indiquait dans la situation, il se contenta de rebondir sur les paroles de Sauveuse, les seules qu’il avait entendu.

“Je suis vraiment désolé d’apprendre ce que tu as vécu depuis tout ce temps, Sauveuse, j’aurais aimé partagé ton fardeau et tes peines plus tôt, je comprends que tu ne pouvais pas le faire, mais tu peux me parler quand tu veux à présent, et… on dirait qu’à Eva aussi.”

Il regarda Eva avec un clin d’oeil, puis il prit l’air le plus humble possible, et se départit de son sourire, attendant la sentence.

“J’ai l’impression que j’ai à répondre de quelque chose, je le ferais sans détour, promis.”

D’un petit rictus timide il regardait les deux femmes côte à côte, peut-être que n’importe quel homme sensé aurait su qu’il était dans une sale posture à ce moment-là … Mais Madhi était définitivement trop candide dans les affaires de cœur…

-

_"Coureur de jupon, ça te va bien, ironisa Evangéline un peu amère."

Elle regarda successivement Sauveuse puis Madhi et s'attarda un peu plus longtemps sur ce dernier.

_"Mais c'est compliqué en ce moment, hein?"

Elle sourit et son visage recommença peu à peu à se durcir.

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"Oui, ça te va bien, poursuivit Sauveuse. J'imagine qu'on t'aime comme ça… Ou malgré ça, je ne me suis pas encore décidée à ce sujet. Et en parlant de décision, tu vas devoir en prendre une. La Vie de mes frères et sœurs est entre tes mains… Mon amour."

-

Evangéline resta stoïque malgré une furieuse envie de surenchérir. La petite voix l'encourageait à tenir bon, à se comporter comme une adulte. Sauveuse était elle en train de la tester, de la provoquer alors qu'elle pensait avoir rétabli la paix. Un peu de temps semblait encore nécessaire.

_"Oui, tu as une décision à prendre, mais je te conseille de méditer la dessus cette nuit."

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Madhi s’étonna du peu d’animosité, en fait il fut rassuré, il avait surement dramatisé la chose, vu qu’il n’y connaissait rien. Il releva la tête, et s’approcha des deux femmes.

“Coureur de jupons? C’est la première fois qu’on me dit ça, les seuls fois où je l’ai entendu, les femmes qui l’attribuaient, semblaient être énervées après la cible. Alors que les amis, hommes, de ladite cible semblaient fiers…”

Il leva ses mains et en posa une sur la joue de chacune des deux femmes en les regardant tour à tour.

“Je vous aime toutes les deux, et je ne le nierai jamais, vous êtes les deux personnes qui m’apportent le plus de bonheur par votre présence, et encore plus de joie quand je vous vois heureuses.”

Un soupir de détresse, en repensant à la situation actuelle.

“Tout est compliqué en ce moment Eva, mais au moins mes sentiments sont limpides. J’aimerais qu’on partage des temps plus lumineux, et on travaille tous pour cela, faisons en sorte que ça marche.”

Un sourire entendu en direction de Sauveuse.

“Je te jure que j’y pense, ça n’arrête pas de mouliner là-dedans, mais je dois aussi te prévenir d’une chose. Rien n’est certain et je cherche surtout la solution la moins pire. J’ai bien conscience qu’on ne peut pas sauver tout le monde, mais là j’ai peur qu’on s’approche à grands pas d’un massacre…”

Sans prévenir il avance et enlace les deux femmes de ses bras et place sa tête entre les leurs.

“J’ai peur les filles… reniflement pour retenir l’émotion, puis d’un rire qui sonne creux, Mais au moins c’est une bonne motivation pour trouver la meilleure solution!”

Madhi serra ses poings, enflé d’une nouvelle détermination, s’affirmant qu’il ne les laisserait pas souffrir.

-

Evangéline se crispa, surprise par l'étreinte de Madhi. Mais sa chaleur était si agréable… Alors elle l'entoura d'un de ses bras et le serra contre elle.

_"Je ferai de mon possible pour t’aider, peu importe les conséquences. On est une équipe."

Elle se rapprocha de son oreille de façon à ce qu’il soit le seul à attendre les mots qui allaient suivre.

_"Il y a un truc que j'aimerai te montrer, rendez vous dans deux heures au dortoir, d'accord ?"

Elle se tourna un court instant vers Sauveuse.

_"Fais attention à toi."

Puis elle les quitta après avoir volé un baiser à Madhi, hésitant mais doux, comme le baiser d’une enfant à son amoureux. Elle ne s'était pas sentie aussi légère depuis longtemps...

Sitôt Evangéline partie, Sauveuse fit un pas et attrapa Mahdi par le menton.

"Tu as beaucoup de chance qu’elle soit aussi compréhensive. Je pensais qu’elle allait te casser la figure et, entre nous, tu l’aurais bien mérité. Fais attention à toi, mon amour. Tes amis ne verront pas d’un bon œil que tu aies deux amantes, ni qu’une d’entre elles soit une Quadrilla."

Un voile de tristesse passa un instant dans le regard de Sauveuse.

"Pauvre Mahdi, tu nous ressembles bien plus que tu ne l’imagines."

-

Madhi fut agréablement surpris de la réaction d’Eva, et hocha la tête à la notion d’équipe, il avait un peu trop tendance à prendre trop sur lui, demander de l’aide oui, mais il partait souvent seul, bille en tête, pour se sacrifier. Un jour il faudrait bien comprendre que tout seul, il ne pouvait pas faire grand chose.

Il accueillit encore plus agréablement le baiser et acquiesça pour le rendez-vous, lâchant l’épaule d’Eva au ralenti. Sauveuse était à quelques centimètres de lui seulement, et il se laissa agrippé le menton, avec un léger déglutissement d’appréhension.

*Mais, bon sang, pourquoi vouloir me péter la gueule?*

“Sauveuse, ma Muse, ma Joie. Tu sais, il y a beaucoup de décisions que mes amis remettent en question, et je les comprends. Mais là je n’ai pas choisi, je le ressens c’est tout.
Et ne présumes pas trop de leur réaction, pour Yuki, à mon avis tu fais déjà partie de la famille.
Grand sourire.
Amants, alors c’est ce qu’on est? Si tant est qu’il faut qu’on se borne à une étiquette. Tant pis si ça dérange que tu sois une Quadrilla, ce qui m’importe c’est ce qui te va à toi. Si les autres essaient de s’en prendre à toi…
Madhi imita un dôme autour d’eux, avec ses mains,
Laisse-moi être la barrière pour une fois."
Clin d’œil.

Il saisit la main de Sauveuse lorsque la tristesse emplit son regard, et porta son autre main à sa joue.

“C’est vrai? Pourquoi pauvre, je trouve ça cool ! D’ailleurs j’aimerais bien savoir à quoi ça consiste d’être vous. En fait j’aimerais bien mieux te connaître, tout simplement.”

Madhi regarde aux alentours, le jour à Pôle Sud, la situation actuelle, il ne fallait pas prendre de risques.

“On se revoit à partir du soir? J’ai compris que tu ne voulais plus te cacher, mais juste encore quelques heures, s’il te plaît. Je vais continuer à réfléchir, et on en viendra à ce que tu souhaite faire, d’accord.”

Il embrassa tendrement la main de Sauveuse, la prit dans ses bras et lui fit un câlin digne de ce nom. Puis avec regret comme toujours, il la laissa seule, après s’être assurée qu’elle avait un endroit idéal pour se planquer. Immédiatement plongé dans ses pensées. Il se rajoutait de plus en plus de pression sur les épaules, mais il ne se laissait pas le choix...

Madhi se se balade dans les rues de Pôle Sud, il a laissé Sauveuse à un endroit familier pour elle, il ne peut malheureusement pas se permettre de la voir n’importe où. Plus ils traînent ensemble, plus ils avaient de chances qu’elle se fasse repérer. C’était peut-être mieux qu’à Aquacity, mais son absence avait été remarquée, qui avait percé sa couverture et qui n’aurait pas la patience de comprendre ce qu’une Quadrilla faisait là, ils n’en savaient rien. Mais il fallait qu’elle reste saine et sauve.

Ça ne l’enchantait pas de ne pas pouvoir la voir alors que c’était peut-être les derniers jours possibles, mais il flânait dans les rues et essayait de trouver une solution à tout ce foutoir. Et puis il allait voir son autre amour, cela le réjouissait d’avance. Il ne prêtait pas vraiment attention au chemin qu’il connaissait par cœur. Et les gens qu’il croisait dans la rue, virent que, bien qu’il les saluait, il n’avait pas la tête à la conversation.

Il finit par arriver devant la porte du dortoir, il se secoua la tête, se donnant des petites tapes pour essayer de se reconcentrer sur le moment présent. Il se demandait ce qu’elle voulait lui montrer, il se mit à sourire en pensant que c’était peut-être enfin une bonne nouvelle, une surprise positive. Il toqua à la porte.

“Eva, t’es là?”

-

Evangéline attendait dans le dortoir depuis qu’elle avait laissé Sauveuse et Madhi plus tôt dans l’après-midi. Elle s’était perdue dans la contemplation d’un dessin, ou plutôt d’un gribouillis hideux qui représentait trois personnes. Elle caressa avec tendresse les deux silhouettes les plus grandes : son père et sa mère. Cette horreur, elle l’avait réalisée peu après leur arrivée à Pole Sud lors d’un atelier avec les autres bugs. Elle y avait mis tous les détails que sa mémoire lui avait fournis, comme le grain de beauté au dessus de la lèvre supérieure de sa maman ou la petite cicatrice sur le menton de son papa.
Les heures avaient filé à toute vitesse sans qu’elle ne s’en aperçoive, perdue dans de jolis souvenirs, et elle sursauta quand Madhi frappa à la porte. Elle se leva pour lui ouvrir.

_"Tu sais que c’est aussi ta chambre, hm?"

Elle avait soigneusement plié le dessin et l’avait rangé dans ses effets personnels. Elle avait aussi troqué sa tenue pour quelque chose de moins strict et de plus sympathique pour sortir. Rien de bien tape à l’œil, mais assez différent des tenues d’entraînement ou de l’uniforme qu’elle portait pour les évènements plus officiels. Et, chose rare, elle s’était coiffée.

*J’espère que j’en fais pas trop…* soupira t-elle intérieurement.

_"Tu me suis ?"

-

Madhi sourit à la réplique d’Eva, c’était bien vrai, c’était sa chambre aussi, il avait pourtant l’impression de ne pas y avoir dormi depuis des lustres, avec les veilles à répétition au dispensaire. Le voyage dans le sous-marin et l’aaaaarbre! dans Aquacity. Il regarda l’emplacement de ses galons absents sur son épaule, le dortoir, il hocha les épaules et se concentra de nouveau sur Eva.

“C’est pas souvent, ça.”

Il passa son pouce et son index sur une mèche de cheveux d’Eva, qu’il ramena derrière son oreille, il afficha un sourire en coin.

“J’aime bien aussi”

Intrigué, il se demandait bien ce qui allait se passer, c’était une parenthèse, une bulle appréciable dans la tourmente actuelle. Il hocha la tête et se décala de l’embrasure de la porte pour la laisser passer.

-

Evangéline prit par la main de Madhi et entrelaça ses doigts avec les siens. Une pulsion bizarre, qui ne lui ressemblait pas spécialement non plus, mais elle aimait bien.

*Je crois que c’est ce que font les gens qui s’aiment…*

Et elle l’entraîna à sa suite. Son enthousiasme faisait qu’elle tirait sur son bras sans trop savoir comment mesurer sa force. Alors, elle se mit à guetter le moindre signe de protestation.

Ils marchèrent sans doute une bonne vingtaine de minute à bonne allure et s’arrêtèrent devant… un tout petit restaurant. Sa devanture ne payait pas de mine, mais à en juger par l’expression de la demoiselle, elle mourrait d’envie d’y rentrer.

_"Le Rescapé, Kars m’y avait invité un jour et je pensais que c’était le bon moment."

Elle exerça une légère pression sur la main de Madhi, comme pour s’assurer qu’il était toujours là et qu’il ne s’était pas envolé.

_"Ça te dit? C’est moi qui paye."

Et elle lui adressa son plus joli sourire.

-

Madhi se laissa entraîner, il sourit lorsque Eva lui prit la main, enfin c’était possible! A vrai dire il commençait à se demander si ça arriverait un jour, et pourtant quel geste simple. Il était un peu ailleurs. A aucun moment il ne protesta, il se laissait porter. Comme si toutes les intrigues de la guerre et des immortels l’avaient quitté en un instant, il regardait de temps à autre les traits d’Eva qui semblait en joie et le reste du temps, les rues de Pôle Sud, comme s’il la redécouvrait, cette bonne vieille base. Il avait beau avoir vu des merveilles à l’extérieur (très peu en fait), il avait un amour particulier pour son lieu de vie des 18 dernières années.

Il fut étonné d’arriver devant un restaurant, et qu’Eva lui propose d’entrer et d’y manger, il fut un instant bloqué. Comment pouvait-on se détendre, profiter de la vie à un tel moment. Il fallait qu’il trouve une solution à tous leurs problèmes!
…
En même temps, il tournait en rond depuis tout à l’heure, et il fallait bien manger. En plus sa réflexion était stupide, quand profiter de la vie, s’il ne le faisait pas maintenant, il était possible qu’aucune autre chance ne se présente. Il regarda l’enseigne songeur.

“Le Rescapé, hmmm, espérons que ce soit prophétique, et pour tous!”

Il fit un clin d’œil à Eva, porta le dos de la main de sa compagne à ses lèvres et l’embrassa. Puis il pointa de la tête la porte de l’établissement.

“Allez, soyons fous.”

-

Evangéline piqua un fard et secoua la tête pour reprendre ses esprits.

_"Tu sais, c’est super modeste par contre, mais tu vas voir. Il y a le petit truc qui fait la différence."

Une nouvelle fois, elle l’entraîna derrière elle et entra dans le restaurant. Il n’y avait pas beaucoup de tables et la décoration était spartiate, mais le petit truc qui faisait la différence trônait fièrement au fond de la pièce. Vieillissant mais entretenu avec soin, le piano du Rescapé semblait attendre sagement que l’un des convives vienne le faire chanter. Un homme mince à la barbe grisonnante s’avança vers eux d’un pas sûr.

_"Une table pour deux?"

Evangéline acquiesça et il les guida vers une petite table, la plus proche du piano. Le propriétaire des lieux tira la chaise d’Evangéline et l’invita à s’asseoir. Elle resta perplexe face à ce geste, mais s’installa tout de même.

_"Nous vous proposons aujourd’hui de la soupe de pomme de terre et de poireaux, avec des oeufs, ou bien une salade surprise."

_"Je déteste les surprises, va pour la soupe, lâcha Evangéline du tac au tac."

-

Madhi se laissa entraîner, amusé. Il vit que le restaurant était modérément rempli, en même temps il ignorait totalement l’heure à ce moment. Il se rendit enfin compte que lui ne s’était pas changé pour l’occasion… Il était tellement à l’Ouest qu’il n’avait pas prévu que ce soit une sortie ce dont parlait Eva. Elle ne lui avait pas fait la remarque, aussi il n’y pensa plus.

Lorsqu’il vit le piano, il s’arrêta net, retenant l’avancée d’Eva, il eut un léger rire et lorsqu’elle le regarda, il montra le piano des yeux et lui fit un clin d’œil.

Il se fit voler son rôle par le serveur qui tira la chaise à Eva, il haussa les épaules et remercia le serveur d’un hochement de tête, il n’avait rien contre les surprises, mais à Pôle Sud, surprise voulait parfois dire “on va voir ce qui reste”.

“La soupe aussi, s’il vous plaît.”

Il hésita avant de s’asseoir, il regarda le piano, et en se penchant sur le dossier de sa chaise, rapprochant son visage de celui d’Eva, il prit un air espiègle et lui demanda, mutin.

“Est-ce que ça te dis de patienter en musique?”

-

Evangéline fronça les sourcils et ses lèvres se retroussèrent en une moue désapprobatrice.

_"Tu me voles ma carte maîtresse !"

Alors, elle se leva à toute vitesse et se rua devant le piano, le fameux rescapé dont cette charmante bicoque tenait son nom.

_"Chacun son tour, ça te va?"

Mais elle n’allait pas lui laisser le choix et de toute façon, elle ne connaissait qu’un seul morceau. Elle caressa les touches avec nostalgie et se retrouva presque vingt ans auparavant, sur les genoux de son père.

_"Mon père adorait la musique. Il jouait du piano comme personne ! Et il adorait danser aussi, comme ma mère. C’est ça qui les a rapproché. Quand je t’ai vu joué du saxophone, j’ai tout de suite pensé à cet endroit."

Et elle commença à jouer maladroitement, les souvenirs d’une gamine de quatre ans n’étaient pas forcément ce qu’ils étaient, même si elle avait passé des heures à répéter, répéter et répéter avec son paternel jusqu’à ce qu’elle maîtrise la mélodie jusqu’au bout des doigts.
musique
Une larme roula sur sa joue lorsque la première note retentit. Ce soir là avec Kars, elle n’avait pas voulu se dévoiler. A cette époque, elle mettait un point d’honneur à garder sa carapace scellée. Mais là, à cet instant, elle était libre de revivre un moment magique.

-

Madhi fut surpris de sa réaction, mais très heureux aussi, il se retourna et la vit filer vers le fameux rescapé. Il acquiesça à sa proposition, impatient d’entendre ce qu’elle allait jouer.
Les premières notes sonnèrent, peut-être maladroitement, mais c’était cristallin, doux à l’oreille de Madhi, il s’appuya les coudes sur le piano, reposant sa tête dans la paume d’une de ses mains et il se contenta de regarder Eva jouer. A un moment, il ferma les yeux et se concentra sur la musique. Il ne vit pas la larme d’Eva avant de les rouvrir.

Il applaudit, doucement, avec confiance, nul besoin qu’une autre personne de l’assistance ne reprenne cet applaudissement. Il passa son pouce pour essuyer la larme de la joue d’Eva, et il lui tendit la main, pour l’inviter à se relever.

Il la laisse se relever tranquillement, puis prends son autre main, se serrant un peu contre elle et dans une posture de slow, la main au-dessus de l’épaule et l’autre sur sa hanche, il baisse sa bouche au niveau de son oreille et lui susurre.

“Il n’y a que nous, ferme les yeux.”

Il se met à pivoter pour lancer un timide slow, le piano s’est tu, mais il fredonne l’air que vient de jouer Eva pour les accompagner, ce dernier s’étant instantanément gravé en lui.

-

Danser… C’était aussi quelque chose qu’elle n’avait pas fait en public depuis longtemps. Il lui arrivait parfois de se déhancher sur des rythmes qui naissaient dans sa tête, à l’abri des regards, sous la douche ou dans un gymnase vide où elle était la seule à s’entraîner. Mais là, elle dansait avec l’homme qu’elle aimait. Evangéline obéit et ferma les yeux en posant sa tête sur l’épaule de Madhi.

_"On a l’air ridicules, non ?"

Mais elle souriait tout en le laissant guider leur slow silencieux.

_"Dis Madhi, je voulais te demander quelque chose…"

Elle le serra davantage contre elle, un peu comme tout à l’heure quand elle avait crispé sa main sur la sienne. Pourquoi cette peur de le voir disparaître ?

_"J’ai pas envie de rentrer à la base ce soir, on reste ici tous les deux ?"

Evangéline leva vers Madhi de grands yeux implorants.

-

Madhi profitait de cet instant de répit, ce trésor immatériel qui leur été enfin accordé.

“Ridicules? Je ne sais pas, et puis quand bien même, je veux bien être le plus grand plouc du monde, si ça peut nous accorder ce genre de moments.”

La danse durait une éternité et pourtant seulement quelques secondes à la fois, il sentit un soulagement dans sa poitrine, comme s’il n’avait pas respiré vraiment depuis des lustres. Et il sentit l’étreinte renforcée d’Eva.

“Bien sûr.”

Le regard que lui lança Eva le déstabilisa, il l’avait rarement vu comme ça. Il ne savait pas trop quoi répondre, ce n’était pas le moment pour s’échapper de leurs responsabilités, le monde et la guerre étaient sur le seuil d’entrée…
… Mais ce n’était jamais le moment, il en avait marre, il voulait que le temps s’arrête, juste une pause, d’une heure, d’un jour… d’une éternité ou deux…
Il la regarda avec le visage le plus doux possible.

“Pas ici … ici, mais ensemble, oui.”

c’était difficile, il en avait vraiment envie, mais il ne pouvait aussi se résoudre à laisser Sauveuse seule, et Yuki, Lyanna et Adamas sans nouvelles.

-

_"Dans quelques jours, nous allons retourner là où tu sais… Et dans quelques temps, nous allons peut-être devoir faire des choses que nous ne voulons pas. Alors j’ai juste envie de m’endormir à côté de quelqu’un que j’aime, parce que je suis fatiguée de me réveiller la nuit avec cette sensation horrible d’être seule dans un monde en pleine guerre."

Elle soupira et secoua la tête avant de s’arrêter de danser.

_"C’était puérile comme demande, oublie. Ce n’est pas le bon moment, mais profitons de cet instant !"

Elle l’embrassa, ou plutôt frôla ses lèvres du bout des siennes. Au même moment, le serveur et propriétaire arrivait avec deux grandes assiettes et deux bols qui tenaient sur un plateau comme par miracle.

-

“Quand je disais pas ici, je parlais du restaurant, je ne savais pas s’il faisait hôtel aussi. Mais je comprends ce que…”

Madhi se figea, répétant avec difficulté.

“... à côté de quelqu’un que tu aimes.”

Un sourire extrêmement niais illumina son visage, il referma son étreinte, elle n’allait pas s’échapper comme ça, pas après cette bombe. Il attrapa ses lèvres au vol et appliqua les siennes un long moment, prenant délicatement la nuque d’Eva avec sa main. ignorant totalement le serveur

“Ça n’a rien de puéril comme demande, tu n’as pas à te sentir seule alors que je suis là.”

Il pointa le cœur d’Eva.

“Mais j’aimerais beaucoup dormir avec toi, et je ne vois pas en quoi c’est ou non le bon moment …”

Il desserra son étreinte, et vit enfin qu’ils étaient servis. il marmonna.

“Et j’en ai marre de le cacher …”

-

C’était excellent, comme dans son souvenir. Simple, mais vraiment très bon. C’était aussi vraiment plaisant de partager enfin un moment en tête à tête, rien qu’à eux, sans personne pour les déranger.
Vers le milieu de la soirée, le propriétaire en personne avait pris place devant le piano. Il jouait une musique entraînante. musique

_"Ah, mon père jouait plutôt ce genre de musique !"

Les autres convives avaient quitté le restaurant, ils étaient par conséquent les seuls à profiter de ce spectacle. Le pied d’Evangéline commença à bouger, animé par une force invisible. Elle suivit le rythme avec sa tête et se leva.

_"Tu te souviens au dispensaire quand tu m’as forcée à jouer de l’assiette sale ? Ben j’avais envie de faire ça !"

Désordonné n’était pas le mot adéquat pour décrire ce qui se passait à présent sous le toit du Rescapé. Désarticulé, ou bien indescriptible, étaient des termes plus adaptés. Rien n’allait, ça ne ressemblait à rien. Elle secouait ses bras, sa tête, ses jambes partaient dans tous les sens. Quand elle s’arrêta sa coupe de cheveux se rapprochait plus d’un plat de nouilles qu’à un joli carré bien net.

_"Montre moi ce que tu sais faire !"

_

Il ne fallut pas attendre qu’Eva ait fini son premier pas pour que Madhi, interloqué, puis rieur, se lève à son tour, il dansait de manière fluide, marquant le rythme en claquant des doigts. C’était ce qu’il préférait faire, être en osmose avec la musique, ses pas n’étaient pas prévus, ils s’accordaient d’eux-mêmes. Il avait pas mal d’entraînement, à force d’être aux soirées entre soldats, comme il finissait le dernier à ne jamais être vraiment bourré, il dansait beaucoup, et sur beaucoup de musiques différentes.

“Hé ben, ton père avait le sens du swing, du groove!”

Il riait fort, ce qui devait plaire au propriétaire puisque non seulement il n’arrêtais pas de jouer mais s’y mettait de plus belle. Il se mit face à Eva et commença à se dandiner en faisant des expressions faciales aléatoires, il pensait aux enfants du dispensaire, et il se dit qu’ils seraient fiers de lui, question énergie.

“Tu jouais très bien de l’assiette, j’ai même hésité à te passer le verre haha, mais chaque chose en son temps, après il y en a encore sur la table.”

Un clin d’œil appuyé, puis tout en se dandinant il vint se mettre près du proprio et en se plaçant juste à côté du piano, il se mit à tapoter en rythme, pour accompagner le maestro, invitant Eva d’un geste, pour qu’elle choisisse un instrument et les accompagne.

-

C’était à son tour d’ajouter sa touche personnelle. Elle chercha rapidement autour d’elle ce qui pouvait être intéressant d’utiliser. Assiette ? Non, déjà vu et pleine de gras. Verre? Trop fragile, elle n’avait pas confiance en sa propre délicatesse. Elle se précipita sur son couteau et sa fourchette, qu’elle rapprocha et frappa sur ses jambes en rythme. Le cliquetis était léger, mais accompagnait relativement bien le reste de la scène. Qu’ils peuvent être niais, ces jeunes, pensa Evangéline avec une voix caricatural, supposée imiter le restaurateur.

_"Admire ! s’exclama t-elle."

Elle improvisa un petit solo de couteau-fourchette en la mineur, vivement tapoté sur sa paume ouverte.

_"Eh bien eh bien, intervint le restaurateur. Voilà des jeunes talentueux."

Il jouait vraiment bien, à la limite de la perfection. Il faisait preuve d’un tel dynamisme, c’était fabuleux ! Les temps n’étaient pas non plus faciles pour les gens de Pôle Sud, mais il restait quand même un peu d’espoir dans certains cœurs. C’était pour ces gens là qu’ils se battaient, pour ces gens là qu’ils défendaient la liberté. C’était pour des gens comme le patron du Rescapé qu’elle enfilait tous les jours son uniforme sans regrets. Mais c’était aussi pour des gens comme Madhi, qui malgré tous les maux du monde réussissait à voir du bien en chacun, même dans la plus pourrie des personnes.
Le patron acheva la musique par un remarquable glissé de notes. Il salua son humble public avant de les laisser tous les deux.

_"Effectivement, ils louent des chambres ici apparemment, mais si tu préfères nous pouvons rentrer. Il ne s’agit pas d’inquiéter inutilement les autres."

-

Madhi suivi avec enthousiasme l’entrain du solo d’Eva, il redevenait un peu le gamin insouciant qu’il avait longtemps été ses années avant les premières vraies missions. Il se retint d’ailleurs de jouer un solo de air guitare sur la jambe du restaurateur au dernier moment…
C’est vrai qu’il était sympathique le bonhomme, ils avaient bien mangé, et vraiment passé une bonne soirée. Et voir Eva manifester d’elle-même cette joie de vivre, cette énergie et toutes ces initiatives. C’était vraiment une tuerie cette soirée.

“Oui on va y aller je pense, mais avant une dernière chose.”

Madhi fit craquer ses phalanges et se dirigea vers le Piano.

-

Il prit place sur le petit banc, il mit un certain temps avant de commencer à jouer, il n’y connaissait finalement pas grand chose, au bout de seulement un an de pratique. Mais il trouverait bien un petit rythme qui accompagnerait les mots qui viendraient. Le débit était incertain, long, mais au final il déclama.

“Le monde m’était raconté, pleins de danger,
Prêt à les braver, pour le découvrir,
Sur ses routes, je m’en suis allé,
Aucune fois je n’ai vu le Soleil me sourire.

Et pourtant, j’en ai vu des merveilles,
En ruines, enfouies dans le passé.
Et pourtant, je n’ai rien vu de pareil,
De comparable, au sourire de l’intéressée.

Le monde m’était conté, condamné,
Prêt à nier pour enfin sortir,
Tous les océans j’ai exploré,
Et j’ai vu la Lune en train de rire.

Et pourtant, j’en ai passé des veilles,
Empli, de lourdes pensées.
Et pourtant, je n’ai su voir la merveille,
Radieuse, à mes côtés, que mon amour enlaçait.”

-

Ils sortaient du restaurant, le temps avait passé, sans savoir exactement combien d’heures. Il se retourna vers Eva et la saisit dans ses bras, il l’embrassa en rafale, sans trop prévenir. Puis il s’exclama ne pouvant plus se retenir.

“Merci! Merci Eva, c’était parfait, exactement ce qu’il fallait. Merci de t’être libérée, de t’être révélée ce soir. Une idée comme ça, c’est du génie, c’est ça qu’il faut au monde, et qu’ils arrêtent de se prendre la tête sur le reste!”

Ça faisait du bien de l’exprimer, de faire sortir cette joie, simple, intuitive, partagée. Il la prit à nouveau dans ses bras. Il ne voulait pas que cela s’arrête, et pourtant déjà il sentait que le poids du monde retombait sur leurs épaules.

“Je sais que c’est peut-être bizarre de te demander ça, mais j’ai pas envie non plus de passer la nuit seul… Je sais ce que ça fait, la dernière fois que je le ressentais, c’était petit, lorsqu’on avait perdu nos parents…”

Madhi se gratta l’arrière de la tête, maintenant il devait aller au bout de sa pensée, de sa demande.

“Et je pense que Sauveuse c’est pareil, en fait pourquoi on devrait dormir seuls? Je sais que c’est compliqué, la situation, enfin je n’en comprends pas toute la complexité et j’en suis désolé. Mais je ne pense pas qu’aucun de nous doive passer la nuit isolé alors qu’on veut être ensemble. C’est beaucoup te demander je le sais Eva, mais est-ce que tu veux bien venir avec moi? Voir si elle n’a besoin de rien?”

-

Evangéline ferma les yeux, partagée entre l'envie de rire et l'envie d'écraser le pied de Madhi. Les deux pouvaient très bien s'appliquer en même temps, mais elle préféra esquisser un simple sourire désolé. Elle se pencha pour prendre les mains de Madhi, les joignit et tapota affectueusement dessus. Elle mit un temps avant d'ouvrir la bouche, au moins vingt longues secondes. Évangéline passa son pouce sur le dos de la main de Madhi puis recula.

_"On a eu notre moment à nous, je vais rentrer. J'ai tout de même mes limites, Madhi. Vas voir comment elle va, elle sera heureuse de profiter d’un instant avec toi avant que tout ne dégénère."

Évangéline lui caressa la joue. Ce moment était à eux, et il était hors de question qu’il s’arrête de la sorte. Avec toute la bonne volonté du monde, elle se mit sur la pointe des pieds pour lui donner un dernier baiser. Cette fois, elle le fit durer plus longuement, et lorsqu’il cessa, elle baissa la tête, hésitante. C’était tellement gênant de s'ouvrir de la sorte, de s’exposer à quelqu'un au risque de le voir réutiliser ses faiblesses. Mais Madhi n’était pas comme ça. Elle inspira une grande gorgée d'air.

_"Je … Je t'aime."

Elle se frotta la tête en évitant de croiser son regard. Le sien se fixa sur la devanture du restaurant.

_"Mais n’en fais pas des caisses."

-

Il était émerveillé, il savait qu’il manquait de tact en disant cela, mais il ne savait pas comment gérer la situation autrement. Il ne voulait pas laisser Eva seule, et Sauveuse non plus, mais les deux ne pouvaient pas rester en présence l’une de l’autre.

Et pourtant Eva trouvait la force de laisser la place, de concéder que leur temps commun arrivait à son terme. Madhi aurait voulu que cela dure éternellement, mais il ne pouvait pas juste ignorer l’autre femme de son coeur. C’est ce qui avait toujours fait sa fragilité au fond, aucune souffrance ne lui était supportable, et il n’avait que peu de moyens d’exutoires. Ce soir en avait été un.

“Merci, merci de ta compréhension.”

Il accueillit ce baiser avec soulagement, et cela se ressentit dans tout son corps. Il sentit ses muscles se détendre, presque le lâcher, et les papillons dans le ventre le porter vers le ciel, mais en ouvrant les yeux, il était toujours sur terre, enfin sous trois hectomètres de glace.

“Je t’aime aussi, Eva”

Comme elle esquivait son regard, il l’enlaça de dos, passant ses bras autour de ses épaules et sa poitrine et chuchota à son oreille.

“Dans la lumière comme dans l’ombre, et dans la guerre comme dans la paix à venir”

Il la raccompagna aussi longtemps qu’elle le voulut bien, en prenant l’initiative de lui tenir la main. Et si ça jasait dans la base, ben ... bas la race.

Evangéline marchait seule vers la base, les yeux baissés vers le sol. Au fond, elle n’était pas vraiment étonnée de la tournure qu’avait pris la situation. C’était de Madhi dont il était question, il avait le mot protection gravé au fer rouge sur son petit coeur tout mou. Elle passa sa main sur sa poitrine. Le sien s’était ramolli, aussi. Une part d’elle en était heureuse - ce mécanisme n’avait plus vraiment lieu d’être - mais de l’autre, elle craignait de perdre ce qui faisait sa force.

Finalement arrivée au dortoire, elle se laissa tomber lourdement sur son lit, face contre les draps, et soupira. Elle saisit à deux mains son coussin et y fourra sa tête pour pousser un petit cri assourdi.

_Putain de bordel de merde ! cracha t-elle.

Puis elle se dressa et jeta l’oreiller contre un mur, dans une vaine tentative d'exutoire. A quoi bon, le mur avait trop peu de répondant. Elle se leva d’un bond, faucha un sac au passage et accourut presque vers un lieu dont elle connaissait encore la route par coeur. Elle l’avait tant empruntée, aussi.
Evangéline tambourina littéralement sur la porte de son ancien chez elle. Kars ouvrit, la gueule enfarinée. Il fronça les sourcils.

_Oh, t’es là? T’es pas en mission?
_J’ai besoin de toi.

Il arqua un sourcil, confus, puis la regarda de haut en bas. Lui non plus ne l’avait pas souvent vue attifée de la sorte - ses cheveux n’étaient plus si bien coiffés, entre sa danse déchaînée et son plat sur son lit. Kars lança un regard en arrière : certains dormaient et d’autre avaient juste levé les yeux vers eux. Vu sa tête, le capitaine de l’équipe Bêta devait certainement faire parti de ceux qui avaient sombré de sommeil.

_Là, maintenant? Ca peut pas attendre demain? C’est pour quoi ?

Evangéline resta plantée devant lui, royalement pas décidée à bouger ne serait-ce que le petit doigt.

_Je ne serai pas là si ça pouvait attendre. J’ai un besoin fondamental de dormir et je suis beaucoup trop tendue pour y parvenir. Quelques passes et chacun retourne dans son coin ?
_Ah parce que si toi tu dors pas, je dois pas non plus ?

Il eut un sourire.

_Bon, c’est bien parce que c’est toi. Je te suis. Est-ce que tu as … ?

Elle brandit deux bokens qui avait un certain vécu à leur actif. Il acquiesça. Elle avait tout prévu, comme d’habitude.

_Laisse moi juste le temps de me changer.

*

Evangéline traîna son ancien chef d’équipe jusqu’à la place où ils s’entraînaient d’ordinaire par mauvais temps, une sorte de gymnase. Elle était, sans surprise, absolument déserte. Kars attrapa au vol l’arme qu’Evangéline lui jeta et se mit aussitôt en garde. Elle passa à l’assaut sans attendre. Il bloqua le premier coup avec aisance, mais le deuxième manqua toucher de peu.

_Tu me réserves le même traitement que la dernière fois? siffla t-il, amer.

Elle s’arrêta net et s’inclina.

_Je comprendrai que tu veuilles arrêter.
_Si tu me disais plutôt ce qui te tracasse, la naine ?

Evangéline lui lança un regard acéré. Ce mot, elle l’avait toujours détesté et il le savait pertinemment. Il lui avait promis de ne plus jamais le réutiliser. C’était de la provocation volontairement, mais pourquoi ? Kars se mit à nouveau en garde, prêt à encaisser. La colère monta subitement chez Evangéline et elle chargea. Les coups pleuvaient, les épées de bois s’entrechoquaient si forts que leur plainte résonnait dans toute la salle.

_Alors ? Parle moi Angel, putain ! cria Kars en bloquant un coup qui visait sa tête.

Les muscles de la jeune femme se tendirent. Angel. Elle avait perdu l’habitude d’entendre ce nom depuis son intégration chez les Delta. Elle était devenue “Eva”. Et c’était surtout Madhi qui l’appelait comme ça… Madhi. Ses bras se mirent à trembler et elle lâcha son arme. Kars baissa la sienne.

_C’est du sérieux du coup ?
_J’ai chié Kars, je crois que je suis amoureuse.

Le bug accusa le coup avec un pas en arrière. S’il s’attendait à ça venant d’elle ! Il fut pris d’un rire jaune.

_C’est la merde hein ? J’ai l’impression d’être une moins que rien, je suis faible et toute molle. Je perds mes propre conviction pour essayer de partager les siennes.
_L’heureux élu? (Elle secoua la tête.) Si tu veux pas me le dire, je te forcerai pas. Après, être amoureuse ça fait pas forcément de toi une loque. Faut juste pas que tu t’oublies non plus.

Elle s’assit à même le sol et il l’accompagna. Chacun avait son arme posée à ses pieds, en attente d’un nouvel échange.

_C’est compliqué, lâcha t-elle.
_Tout est toujours compliqué.

Et il savait de quoi il parlait. Il avait un petit pincement à l’estomac de la voir comme ça, abattue, mise à nue. Il voyait sa partenaire sous un angle nouveau qu’elle n’avait jamais montré aux Bétas. Une ombre passa dans les yeux d’Evangéline.

_Je passerai toujours après une autre, j’ai l’impression. Va falloir que je m’y fasse.
_Une autre ? répéta Kars, interloqué.
_Quand je te disais que c’était compliqué. Pour simplifier, je suis pas seule dans la compétition, mais tu comprends, il nous aime toutes les deux, bla bla bla.

Kars croisa les bras sans la quitter du regard. Il n’imaginait pas qu’elle ait pu se laisser embarquer dans une situation comme celle-ci, pas la Evangéline qu’il connaissait. Ou qu’il croyait connaître, se fit-il comme réflexion. Elle prit le boken dans une main et le fit passer dans l’autre, et ainsi de suite.

_C’est un peu salaud de faire ça à quelqu’un, c’est jouer avec ses sentiments.
_J’y ai songé, mais c’était ou ça ou renoncer à lui et j’en ai pas envie, alors je fais avec en me défoulant comme je peux. Je repars demain en mission, ça devrait me changer les idées.

Il lui tapa amicalement sur l’épaule, comme elle l’avait fait avec Lyana un peu plus tôt. C’était de lui qu’elle tenait cette démonstration d’affection un peu bourrure.

_Quand tu rentreras, on ira manger un truc et on se tapera sur la gueule comme jamais. Là faudrait peut-être que tu ailles dormir.

En effet les yeux de la demoiselle commençaient à méchamment se rapprocher de son menton. Elle opina et ramena le deuxième boken vers elle, puis le replaça avec son jumeau dans leur sac. C’en était fini pour ce soir.

_Tu as raison, je vais y aller. Merci, entre toi et Yuki, j’en ai de la chance. Mon moral fait les montagnes russes, mais c’est un peu grâce à vous qu’il remonte les rails.
_Même si t’es partie, je resterai toujours ton capitain. C’est mon rôle, soldat.

Evangéline le salua comme il se devait et disparut. Kars soupira et se massa les tempes. Il n’en avait pas fini d’en baver, et lui aussi risquait de prendre cher à essuyer les peines de la demoiselle. Mais comme il lui avait dit, il était là pour elle.

Dernier soir à Pôle Sud, tard dans la nuit:

Madhi ne trouvait pas le sommeil, décidément pas, Sauveuse semblait inconsciente, il ne savait pas si elle dormait vraiment, ça ferait partie de ses questions du lendemain. Mais pour l'instant il voulait juste qu'elle se sente en sécurité et calme. Il l'avait laissé discrètement dans la planque qu'ils avaient trouvé, une vieille bicoque qui avait appartenu à une dame qui était malheureusement morte au dispensaire. Sans laisser d'héritier, l'habitation n'avait pas encore été reprise, par qui que ce soit. Ils étaient les premiers squatters, étonnamment d'ailleurs.

Il était parti dans le salon, la seule autre pièce du petit appartement en fait. Il regarda la tenture très jolie qui était étendue sur le mur, il la décrocha religieusement et la plia, cela fit voler de la poussière et il eut tout le mal du monde pour se retenir de tousser et de "réveiller" Sauveuse. Il avait devant lui un grand mur, vide, il fouilla la pièce, et les quelques marqueurs/fusains et feuilles qu'il glana, se retrouvèrent sur une table basse pour les uns et accrochées au mur pour les autres.

Il tourna le vieux fauteuil vers le mur, éclaira la vieille lanterne et s'assit, les coudes sur les genoux, les mains croisées juste sous le menton, turbinant à toute allure, sa tête allait exploser.

(entre guillemets et italique est exceptionnellement les pensées, pour ne pas surcharger de gras le rp, mais ce ne sont en aucun cas des paroles.)

"Bon, il faut trouver une solution à cette histoire."

Madhi prit un fusain et écrit en gros au centre "Paris"

"D'abord comment Paris est arrivé dans le planning? Ceux sont les Quadrillas de Rebirth qui sont apparus dans la cathédrale de verre, une brève escarmouche a eu lieu. Ils ont tué Gladius, ce dernier s'est jeté pour protéger Wilfried, et ils ont arrêté le combat. Disant que ce serait suffisant pour Ghost (c'est qui? un quadrilla Cosmo?), que tout se réglerait à Paris dans un mois, et qu'ils ne voulaient pas de civils au milieu..."

Madhi traçait sur les feuilles en haut à gauche, la bulle d'information Quadrilla

"J'ai au début cru qu'ils nous donnaient rendez-vous à nous autres bugs, pour nous éliminer et devenir humains. Mais ce qu'a dit Kranystène puis Sauveuse mène à penser qu'ils veulent que tous les MILITAIRES de la résistance se ramènent. A priori, il y aura d'autres forces en présences, probablement des unités de l'Omicron, et les Quadrillas de Cosmo. Sauveuse a affirmé que ceux de Rebirth se battront, avec ou contre nous. S'ils se battent avec la résistance, c'est qu'il y a des adversaires... Ce qui nous mène aux immortels

Madhi se mit à tracer la bulle d'information "immortels" en haut à droite.

"FinLongFinger est en vie, il arrive comme une fleur, prétextant qu'il voulait observer comme l'a toujours dit Sollipsis, mais là son fils adoptif qu'il aurait pu défendre, s'est fait tué, alors il décide de redevenir acteur et d'aller casser des culs. Sachant qu'il accepterait peut-être les Quadrillas Rebirth dans notre camp, et que l'on a jamais parlé d'une quelconque autre force en présence à Paris, il s'apprêtait quand même à y aller, il sait donc qu'il y a une armée là-bas.
Et il sait que c'est stratégiquement complètement con d'y aller."

Un gros point d'interrogation apparut à côté de FinLongFinger et du mot motivations.

"Comment, un stratège multi-centenaires, qui a mené la résistance pendant tant de temps, tomberait dans un piège aussi grossier. On invite pas une armée qui a passé des années à se cacher. Il y aura à Paris:
-Soit, des forces monstrueuses, qui ont déjà préparé le terrain, et qui ont un clair avantage tactique sur leur adversaire.
-Soit, il n'y aura personne, la résistance aura éparpillé son armée, elle se prendra une grosse frappe orbitale. Et Aquacity + peut-être Pôle Sud seront envahis à moindre frais.

C'est impossible qu'il n'y ai pas pensé, il est peut-être confiant en sa resplioid et en les nôtres, mais ça ne change rien aux maths ( à moins qu'il s'attende à ce qu'on y aille juste entre porteurs de resplioids?). il sait sûrement autre chose, quelque chose que j'ignore, mais ça nous ramène à ..."

Trait au fusain, long, hésitant, qui termine sa course sur "Paris".

"Au niveau immortels, on est servi. Il y a Sollipsis qui devient à priori la plus inoffensive, elle n'a plus de pouvoir de décision, elle est peut-être plus pion que joueuse dans la grande partie d'échecs ... ou elle joue très bien. Il faut encore qu'elle nous révèle ce qu'elle sait sur les Fluvius, où elle les a rencontré, c'est quoi leur histoire commune et jusqu'où vont leurs pouvoirs surnaturels?
En passant à Myphos, il faut se dire que les Fluvius ont été relâchés pour une des deux raisons suivante:
-Myphos a fini les expériences sur eux et a reproduit des particularités de leur pouvoir à sa manière, après tout il a pu construire Cosmo et Rebirth. Où les Fluvius, traumatisés, le servent.
-Les Fluvius ont été libérés par la résistance de la haut, probablement la résistance Sélénite. Au vu de la mascarade du trou dans les nuages ... immobiles... et de Séléné en face... Et de ce qu'on a appris de Chrysaor Orion ils auraient pu les libérer. Ce qui expliquerait pourquoi ils connaissaient une fréquence envers Pôle Sud. Mais n'expliquerait pas du tout pourquoi ils ont pu passer le blocus, et qu'en trois semaines le signal n'ait pas été capté par l'Omicron!!!"

De rage,Madhi failli rayer la deuxième option. Trop de faux-semblants, les seules personnes qu'il pouvait croire tiendraient toute dans ce minuscule salon.

"Reprenons, J'ai vu l'aura des Fluvius, elle est concentrée dans les yeux, mais est-ce qu'elle était pâle? je dois m'en souvenir bon sang!
Pour l'instant je n'ai qu'un pressentiment à propos d'Orion mais s'il se révèle vrai, Myphos est en train de jouer un coup de maître...
Il faut que je mette une stratégie au point pour le confondre... Pourvu qu'il soit encore à Aquacity...

Wilfried me paraît moins menaçant, si Kranystène essayait de s'en prendre à lui, c'est qu'il n'est peut-être toujours dans aucun camp, ou qu'il en sait trop. Il est aussi possible que ce soit un coup monté, il pouvait totalement survivre aux Quadrillas
D'ailleurs si Wilfried n'a jamais été résistant, qu'est-ce qu'il foutait à la Nouvelle-York il y a dix-huit ans?
A ne pas mettre de côté, Myphos est intelligent, il doit savoir pour l'immortalité de Wilfried que c'est un enfant d'immortel, et que si on suit la théorie des runes, c'est son opposé. Je pense que s'il a vraiment voulu le tuer, c'est parce qu'il a du faire des simulations avec Cosmo et Rebirth, et Wilfried doit à chaque fois lui poser problème, voir le tuer..."

L'emplacement "immortels" était bien surchargé maintenant

"Et du coup, Myphos sous couvert d'Orion/Fluvius? ou autre, oeuvre pour que l'on aille ..."

Nouveau trait, "Paris" ...

"Merde!"

Madhi écrivit le nom suivant en appuyant sur le fusain rageusement.

"Classis, notre surveillant ... Celui qui en sait le plus, qui influence la géo-politique du système stellaire entier, et le moins accessible après Myphos, non même avant. Il sait quelque chose sur notre univers, et il est probablement l'homme au masque, ce qui veut dire ..."

En retenant une larme, il brisa le fusain sous la frustration et la tristesse. Toujours silencieux, il reprit un autre morceau.

"Qu'il ... qu'il sait ce que Sens est, quels sont les règles du putain de jeu qu'on est en train d'expérimenter ou auquel il nous fait sadiquement "jouer". C'est horrible de se dire ça, mais je me demande encore si ça l'emmerde de faire son boulot de surveillant ou s'il a lancé le jeu parce qu'il s'emmerdait ... Quel monstre ... J'espère tellement, TELLEMENT avoir tort sur lui."

Madhi porta le collier de sa mère de sa poitrine à sa bouche et l'embrassa religieusement.

"Je te jure, Maman, j'essaie, j'essaie de toutes mes forces. Et autant je suis même prêt à le faire pour Myphos, mais est-ce que je trouverais la force de lui pardonner ... à lui ...? Je parie qu'il sait même ce qui est arrivé à Théo. Je ne pense même pas qu'il y a un moyen de le contraindre à nous révéler quoique ce soit...

Ce qui nous amène à Asilis, elle est malheureusement inconsciente... Ou heureusement peut-être, et c'est le seul lien fixe avec Classis, malheureusement, je vais devoir me servir de cela madame, pardonnez-moi, vous êtes PEUT-ETRE la seule innocente dans tout ça...

En tous les cas, que Classis laisse les choses aller vers/ influence des gens pour qu'elles convergent à"

Nouveau trait, même destination, "Paris"

"Merde!!!"

Madhi prit à nouveau du recul, il tournait en rond dans le salon, le temps passait, et il avait de plus en plus de mal à réfléchir, mais toujours aucun sommeil. Il reprit sa place dans le fauteuil, un verre d'eau à la main. Oubliant complètement de le boire alors qu'il venait de le remplir.

"Dans moins de deux semaines, nous risquons d'aller à Paris, nous risquons d'y mourir, de perdre les gens qu'on aime, de perdre tout ce qui a un sens à nos yeux!"

Il respira profondément et mordit un coussin pour s'empêcher de lâcher un hurlement de rage, primal.

"Dans deux semaines on va revivre une Nouvelle-York !!!"

Ce n'était bien sûr que des suppositions, mais plus il y pensait, plus il s'y enfonçait. Il se noyait dans cette idée... Il avait du mal à empêcher les souvenirs de refluer. Il passa un moment en position fœtal sur ce fauteuil, à pleurer silencieusement...
... Et il dû s'assoupir quelques instants, en revenant à lui, il se sentait plus détendu, plus calme, mais vachement vaseux.

Il se dirigea vers le coin inférieur gauche, et y inscrivit "Omicron"

"Qu'est-ce que l'on sait sur eux, un tank autonome a faillit nous faire sacrément mal, et on était cinq dessus, dont Wilfried, si en plus ils sont protégés par des barrières Quadrillas... A moins que les Quadrillas de Cosmo soient uniquement offensifs? Bon c'est pas rassurant non plus.
Il y a aussi l'infanterie, qui est répartie et bien plus nombreuse , dans le système stellaire. Dans l'orbite de la terre, et dans les villes terriennes... Mais ils doivent en avoir marre de vivre sur ce qui reste de ce caillou...

J'aimerais bien savoir à quel point ils sont endoctrinés, je dois poser des questions à Sauveuse pour mon plan pour les Quadrillas et il doit surement y avoir une sorte de pc central pour les tanks "autonomes"...
Au final, c'est là-dessus que j'ai le plus de blancs, putain pourquoi j'ai pas suivi les cours à l'époque! Mais Lyly doit savoir elle."

Il se dirigea ensuite vers le coin inférieur droit. Et le mot "résistance" apparut

"On a... "

Il regarda son épaulette, vide de tout galon.

"Ils ont peu d'effectifs en comparaison, des techniques commandos et de guérillas, pas de bataille rangée, ou en tout cas, ça se perd. Le matériel est loin d'atteindre le tank autonome. A ce point là, je pense de plus en plus sérieusement que FinLongFinger ne fera pas appel aux troupes régulières, sinon ça va être un massacre. Je me rappelle des soldats de Konrad ... Je suis pas meilleur qu'eux, mais l'entraînement c'est plus trop le fort de certains unités...

En plus de ça, comment les convaincre de combattre à côté des Quadrillas, même si apparemment ils ne peuvent pas tuer ... ou presque... qu'est-ce qu'il s'est vraiment passé la nuit de cette fameuse bataille...?"

Madhi listait les faiblesses de la résistance, mais l'encadré des forces restait désespérément vide. Soudain il eut l'idée et se tapa le front. et il écrivit avec entrain "idéal"

"Ca fait idéaliste justement, mais c'est ce que n'a pas l'Omicron. Ce qui m'inquiète, c'est que c'est les paroles d'Orion qui m'ont donné l'idée (notre combat est politique), ne sachant quel rôle il peut bien jouer... Pitié que son aura faible fasse partie des stratagèmes de la résistance Sélénite, sinon je viens de mordre à un appât...

Mais en théorie, les gens de l'Omicron, bien qu'endoctrinés, ont surtout peur de ce qu'il se passerait s'ils se rebellaient (y a qu'à voir l'état de la terre...)."

Madhi reprit les cents pas de plus belle, gesticulant avec ses bras pour appuyer ses propos muets.

"Et pourtant, c'est la seule chose qui puisse inverser les forces, en faisant le moins de morts possible, aucun en étant EXTREMEMENT optimiste. Si l'on arrive à neutraliser les tanks autonomes, montrer que les Quadrillas Rebirth sont avec nous, neutraliser les Quadrillas Cosmo et désarmer les troupes de l'Omicron, soit-disant FinLongFinger ne craint pas les balles! Il n'aura pas besoin de tuer, surtout avec sa Resplioid surpuissante! Si l'Omicron est vaincu sans violence, je ne sais pas comment la propagande Omicronienne tiendra!

Un bon discours sur les bugs/répercussions et hop, bien sûr dans un premier temps, ne seront recrutables que les orphelins, et difficile de leur faire confiance, mais la vapeur peut-être renversée!"

Il sautilla sur place, ayant une piste d'espoir, aussi folle et fine qu'elle fut.

"A l'inverse, si l'on arrive comme des bourrins, qu'on massacre toutes les unités de l'Omicron, que l'on perds les gens de la résistance, et qu'en plus les Quadrillas mettent la dissension dans tout le foutoir. On est sûr de perdre plus que la bataille."

Il s'arrêta un instant et se rendit compte qu'il disait encore "on" pour la résistance, cela le fit sourire, il reprit sa marche.

"Il ne faut pas aller à Paris, il ne faut pas donner toutes les positions de l'Omicron à FinLongFinger."

"Lorsque l'on se voit proposé deux chemins, le troisième est souvent le meilleur... Il faudrait que l'on demande les positions des spatioports, que l'on prenne, "doucement" si ce n'est pacifiquement leur contrôle, en ralliant les hommes sur place. Compliqué, mais qui dans la résistance saurait faire marcher un spatioport?
Et surtout que l'on prenne les positions où ils transmettent les communications, pour les brouiller et nous laisser le temps d'opérer sur Terre. Ensuite, en intimant aux troupes des indications les faisant se poser ou bouger le blocus, on pourrait sûrement réussir à l'infiltrer et s'en emparer. Peut-être que Sauveuse peut nous donner aussi les vaisseaux amiraux..."

"Une fois cela fait, il faudrait se faire passer pour les libérateurs de la Terre, avec une flotte qui détournerait l'attention. Le blocus doit être assez gros pour cela. Il faudrait aussi entrer en contact avec la résistance Sélénite et Martienne, pour qu'elle permette l'approche de plus petits vaisseaux, pendant que Myphos, Bran Oberon, Classis ou qui que soit l'actuel Omicron, a les yeux braqués sur la flotte. On s'infiltre, on choppe le tyran et on met fin à la guerre avec toute la communication dont on est capable."

"On pourra enfin utiliser les ordinateurs comme ils auraient dû l'être. Prévoir les maladies, les catastrophes naturelles, les arrivées d'astéroïdes, et s'en prévenir. Bon bien sûr, si des gens veulent continuer à avoir leur vie tracée, il faudra leur laisser consulter ça. Et puis les Quadrillas survivront comme ça."

Il eut un regard attendri, fatigué, mais amoureux en direction de la chambre, puis il s'affala à nouveau sur le fauteuil, fixant le mur, rempli d'informations, et de tant de traits convergents vers le centre, un long soupir s'échappa de la bouche de Madhi.

"Mais on va probablement aller à Paris..."

Quelque part en 1002

La Résistance n’avait pas traîné et s’était dépêchée de les scinder en plusieurs “unités”. Mais malgré tout et pour plus de simplicité, les bugs suivaient les différents cours par groupes.
Cette semaine-ci, leurs enseignants avaient décidé de mettre à l’épreuve leur créativité autour de différents ateliers. Evangéline et le reste de l’équipe Béta avaient été jumelés à l’équipe Delta pour celui du jour : un atelier de dessin.

Le regard d’Evangéline allait de la feuille au pot de crayons placé au centre de la taille. Leur professeur avait insisté pour qu’ils rendent tous une production avant la fin de l'heure, mais elle n'avait jamais vraiment aimé dessiné. Elle leva la main pour prendre un crayon et poussa sur ses pieds. Tout était format mini chez Evangéline, elle était très certainement l'individu le plus minuscule de la classe. Aussi, ses doigts frôlaient tout juste le pot. Kars, qui n’avait rien manquer de la scène, renversa vers lui le pot et ses crayons colorés. Les autres Béta pouffèrent de rire et Evangéline leur lança un regard agacé. Son père lui avait dit que les garçons faisaient souvent des choses stupides pour se rendre intéressant, mais ce gros débile commençait sérieusement à lui taper sur les nerfs.

-
“- Kars, pourquoi t'as fait ça ? Tu crois que c'est bien d'être méchant avec les autres ? Ce n'est pas très intelligent”
Yuki se leva, ramassa les crayons et les posa à côté d'Eva. Elle se retourna de nouveau vers Kars, son petit index pointant sa direction, et son poing gauche posé sur sa hanche, comme une mini maman prête à sermonner.
“Hideaki dit que si tu es méchant avec les gens, M. Karma va venir te gronder et te punir. Et M. Karma il sait toutes les bêtises qu'on fait. “
Elle retourna s'asseoir à sa place, fit un sourire à Eva avant de reprendre avec minutie le traçage du contour de sa main.

-

Madhi avait du mal à rester assis sur sa chaise, il balançait ses pieds d’avant en arrière. Il regardait les autres, et à chaque fois qu’il captait leur attention, il leur faisait un grand sourire. Mais au bout de plusieurs minutes, il n’avait toujours rien dessiné. Il regardait la grande table autour de laquelle ils étaient tous rassemblés, la table qui les séparait. Il voyait chacun faire son dessin dans son coin, et ça l’ennuyait.

Madhi se leva, il alla vers la table où il y avait toutes les feuilles de dessins posées, il prit une chaise et la poussa contre, afin de pouvoir monter dessus et s’emparer de plusieurs feuilles d’un coup, un bon paquet, ne sachant pas compter. L’enseignant intervient.

Prof”Madhi, on peut savoir ce que tu fais?”
“Oui!”

Mais sans répondre plus avant, il se dirigea à nouveau vers la table commune, avec son butin, il avait fait ça en un temps record, avec ses talents de voleur de bonbons, il devenait plutôt doué. Il remonta sur sa chaise, puis sur la table commune, il lâcha ses feuilles au centre de la table et il en éparpilla plusieurs pour en tapisser le centre de la table, se chevauchant les unes les autres.
L’enseignant allait à nouveau intervenir, faire descendre Madhi de la table, mais il fut surpris et hésita un instant. Suffisamment pour que Madhi puisse attraper son pot de crayons et le ramener au centre de la table. Il leva les bras au ciel, avec l’ambition d’un enfant de 6 ans, il hurla.

“Allez Venez, on va faire le plus grand dessin du monde !”
Prof”Madhi! Descends de la table, maintenant s’il te plaît.”
Se tournant vers le prof et en imitant la voix du professeur de sport
“L’important, c’est le travail d’équipe”

Au lieu de descendre de la table, il se saisit du maximum de crayons de toutes les couleurs qu’il put dans ses deux mains jointes. Il s’allongea maladroitement à plat ventre sur la table et commença à faire des rosaces multicolores sur une des feuilles enchevêtrées. En battant des pieds dans les airs, il avait un grand sourire et attendait/espérait que les autres le rejoignent.

-

Suite à la remarque de Yuki, Kars eut un petit rire moqueur et retourna à son dessin. Evangéline la remercia à voix tellement basse qu'elle ne dût même pas l'entendre.
Elle regarda Madhi opérer sa drôle d'affaire. C'était un garçon sympathique bien que très étrange. Elle gardait en mémoire leur arrivée à Pole Sud, lorsqu'il s'était dressé de toute sa hauteur pour la protéger. D'une part elle avait très envie de le rejoindre, mais de l'autre elle préférait rester à l'écart et observer. Aucune des deux propositions ne gagna, elle fit un compromis.
Évangéline prit un crayon dans sa main et appuya la mine sur sa feuille. Un dessin… Ou le plus grand dessin du monde. Elle leva les yeux vers Madhi et s'appropria un petit bout de feuille du plus grand dessin du monde. Elle esquissa un flocon bleu stylisés. Pour être honnête, il fallait être un génie pour reconnaître le flocon… Mais elle était contente quand même.

-
Yuki regardait le contour de sa main sur la feuille. C'était très jolie, mais la proposition de Madhi lui donna l'idée de penser plus grand. Elle monta sur la table s'allongea par dessus les feuilles et cria :
“- Qui veut faire le contour de tout mon corps ?!?!”
Elle était en jupe et n'avait absolument aucune conscience qu'elle montrait sa culotte à certains de ses camarades. Mais elle s'en fichait pas mal. Elle était constamment tachée, dépenaillée, et se fichait bien de ses tenues quand elle faisait le cochon pendu. Le mot “convenable” l'exaspérait au plus au point.
Elle attendait, allongée sur la table, jambes et bras écartés, qu'un camarade l'aide à réaliser son idée folle.

-

Madhi vit l’engouement plus ou moins partagé que sa proposition suscité. Il rit à gorge déployée lorsque Yuki vint le rejoindre et s’allongea sur la table. Il avait aussi remarqué Evangeline qui osait à peine, mais osait tout de même, participer à son échelle. Il regarda le professeur qui levait les yeux au ciel. Madhi se demandait bien ce que cherchaient les adultes au plafond, il y avait toujours un moment où ils faisaient ça en sa présence. Sauf peut-être Papymède.

“Bouges pas Yuki, où tu vas être toute coloriée! Et comme tes cheveux ils sont de la même couleur que la feuille, ben on peut se tromper.”

Madhi s’approcha de la cobaye avec son bazooka de couleurs et commença à tracer un arc-en-ciel autour de son amie. Il sortait la langue sous la concentration et il en oubliait parfois de suivre son tracé, il était donc en étirement et il fit glisser quelques feuilles en se déplaçant. Il regarda Evangeline et puis il regarda à nouveau son oeuvre, tout en s’adressant à elle.

“Fais pas attention à Kars, Angel, il fait juste sa tête de bite.”
Prof”Madhi!!!”

Madhi ne savait pas ce que cela voulait vraiment dire, il pensait que cela signifiait “faire son intéressant”, il avait juste surpris une blague beauf entre soldats, l’un d’entre eux se plaignait de ne pas réussir à intéresser les femmes et l’autre lui avait répondu quelque chose comme “Pourtant avec la tête de bite que t’as”. Ils avaient tous rigolé, même l’intéressé, Madhi pensait que c’était drôle, du coup il ne comprit pas la réaction du prof.

“Oui?”
Prof”On ne dit pas de gros mots comme ça!”
Hochant les épaules ”Kars fait sa tête de PETITE bite?”

Le professeur se déplaça d’un pas rapide, colérique et attrapa Madhi sous les aisselles et le souleva de la table, un air furieux sur le visage. Madhi lui fit un grand sourire et l’enlaça en lui déposant un bisou sur la joue. Le professeur essaya de lui faire comprendre que là il le grondait et qu’il était puni, il le mit au coin.
Madhi eut tout le mal du monde à ne pas regarder en arrière, puis il sortit le seul crayon qu’il avait réussi à planquer dans ses manches et commença à dessiner sur le mur.

-

Evangéline pouffa discrètement quand le professeur embarqua Madhi vers le piqué. Quel gros bêta, tout le monde savait que Bite était un des plus vilains gros mots! Dès que l'enseignant leur tourna le dos pour s'occuper des autres ateliers, Evangéline quitta la table et se rapprocha de Madhi. Elle se pencha vers son oreille pour chuchoter.

_C'est pas beau ce que t'as dit tout à l'heure, mais je suis sûre que c'est vrai. La prochaine fois, dis plutôt tête se zizi, ou bistouquette. Tu finiras pas au coin comme ça.

Elle glissa dans sa main un autre crayon.

_Désolée, c'est un peu ma faute. OH! J'ai une idée ! Attends moi.

Elle courut vers leur enseignant et lui donna le plus fulgurant des coups de pieds jamais vu dans le monde des minipouces. Elle avait tout donné, sourcils froncés, langue tirée et mordillée entre ses dents de lait. C’était un beau coup de pied de compétition qui battait des records ! Il se tourna, outré et désemparé de voir cette classe de bambin se métamorphoser en classe de petits monstres. Il ouvrait de grand yeux étonnés. Evangéline baissa les siens et cacha sans trop de difficulté son sourire timide.

_Pourquoi ?! s’exclama le pauvre homme.
_Je peux aller au coin ?

Le professeur mit un moment avant d’accuser le coup, puis adopta un air sévère et acquiesça sans vraiment comprendre ce qui s’était passé. Evangéline courut rejoindre Madhi.

_Super idée ! Comme ça j’ai plus à être avec eux !

Elle avait encore un crayon dans sa main, mais sa maman lui disait que c’était pas très poli de dessiner sur les murs. Alors elle le garda, tout simplement.

-

Yuki releva la tête. Madhi n'était plus là à faire le contour d’elle. Elle remarqua qu'il était au coin et qu'Eva était en train de se faire punir aussi. Elle eu une moue qui traduisait sa réflexion à faire sortir son frère et sa sœur de là, puis un sourire annonçant le plan machiavélique cheminant dans sa petite tête.
Elle alla chuchoter discrètement à l'oreille de tous les enfants un à un. Elle dû négocier avec certains, promettre des choses à d'autres. Au bout de 5 petites minutes, elle regarda ses camarades et fit un petit hochement de la tête. À ce moment là, les enfants commencèrent à crier, tous ensemble, dans un brouhaha infernal, en boucle le mot “bite”.
“BITE ! BITE ! BITE !”
Le professeur se retourna vers la classe, criant de cesser cette mauvaise blague. Mais Yuki avait su négocier leur obstination. L'enseignant fut rapidement désemparé, tout en se retenant d'éclater de rire. Il n'y avait pas assez de “coin” dans la pièce pour tous les punir.
Voulant juste que cela cesse, car il commençait à paniquer, il ordonna à tous les enfants de sortir.
Il voulait juste les faire arrêter, si le conseil apprenait qu'ils disaient de telles choses à l'école, il aurait des soucis. De toutes évidences, les enfants avaient besoin de se défouler.
Yuki rejoignit Madhi et Eva tout sourire. Elle avait beaucoup de dettes parmi ses camarades, mais cela valait la peine. Seul Akina avait accepté de la suivre sans contrepartie.

-

Madhi commençait à tracer discrètement sur le mur, il dessinait quelque chose de complètement aléatoire, non pas qu’il n’avait pas d’idées, il en avait trop au contraire.

“Oh je vais faire un robot, mais en fait c’est une plante sur sa tête? Oh! C’est une plante qui pousse à la surface! Hmmm à quoi ça peut ressembler?”

Madhi avait une certaine facilité à parler, parce qu’il avait beaucoup d’entraînement, il parlait tout le temps et parfois tout seul. Comme à ce moment là, il se tut seulement lorsqu’Eva le coupa. Il lui sourit.

“Ben si apparemment c’est beau une tête de bite, ça plaît aux madames à ce qu’on m’a dit, soupir, il avait encore dit (m’a dit). Alors qu’une tête de zizi ça doit être moche, hmmm, mais ça doit être rigolo !”

Il prit le crayon.

“Oh super, merci Angel!”

Sans se douter une seconde du prochain méfait de sa comparse, il commença à tracer des deux mains sur le mur, de moins en moins discrètement, en faisant des bruitages étranges avec sa bouche. Les deux couleurs entraient dans une danse qu’il se sentait obligé de commenter. N’étant pas du tout ambidextre, son tracé gauche était ce qu’il avait fait de plus mauvais jusqu’à présent. Ce tracé était à l’art, ce que les égoût étaient à Pôle Sud, ce qu’on ne préfèrerait pas voir…
Eva revint à ses côtés, il n’avait pas vu qu’elle avait molesté le prof pour en arriver là, il lui sourit et lui fit un bisou sur la joue.

“Merci Angel, il est trop bien celui-là!”

Lorsque le chaos vulgaire se répandit dans la salle, il tourna la tête et vit tous les enfants crier en choeur, il sautilla sur place et reprit le cri en rigolant. Il courait dans toute la salle, apparemment Kars ne lui avait pas trop pardonné, et il lui fit un croche-patte. Madhi fit une glissade vers l’avant après un bond de presque un mètre en avant dans un “Biiiiiiiite” d’agonie. Il fit un roulé-boulé et se redressa en rigolant, puis tenant son coude.

“Aïe”

Le prof les fit sortir, ce qui voulait dire qu’ils allaient sûrement être récupérés par leur précepteur, dommage pour le dessin, tant mieux pour la rigolade. Il regarda ses camarades et ne sembla pas s’attarder sur Kars, à vrai dire il n’avait pas vu le coup bas. Il s’approcha de Yuki et lui tendit son coude à 10 centimètres du nez.

“Yukiiiii? Bisou magique?”

Puis, il sortit de son pantalon, les crayons piqués qui étaient retenus par l’élastique contre son petit corps, il se mit un crayon entre chaque doigt et se mit face au couloir, il se mit à courir à toute vitesse en marquant les murs d’une ligne erratique avec les crayons.

“Je suis FinLongFinger wouuuuuusssshhh!”

-

Evangéline suivit Madhi des yeux lorsqu’il détala en criant. Elle tendit la main vers lui, bouche bée par son comportement. Ah ça, si elle s’y attendait ! Puis elle se tourna vers Yuki, perplexe.

_Il… est toujours comme ça ?

Elle osait à peine imaginer le grabuge qui devait régner dans leur dortoir. D’un autre côté, elle aurait volontiers échangé cette ambiance-ci contre un peu de tranquillité. Les gamins pouvaient être terribles entre eux.

-

Yuki fit le bisou magique sur le coude de Madhi avant de souffler un peu dessus et crier “bobo disparaît” en agitant ses doigts comme si elle prononçait un sort. Sa maman faisait cesser ses pleurs comme ça, et Yuki croyait dur comme fer à la puissance de cette incantation.

Quand Madhi partit en courant dans le couloir, et qu'Eva lui posa cette question étrange pour Yuki, elle lui répondit, comme si cela était d'une évidence clair :
“- Comment Madhi pourrait ne pas être Madhi ? Allez vient”
Elle attrapa Eva par le bras et se mit à courir dans la même direction que Madhi.
“- Attend-nous Madhi ! Je veux bien faire le Toubleu mais tu ne me tues pas ! Ça me fait peur quand Agonis le fait !”

-

Madhi ne sentait plus son coude douloureux, question crédulité/placebo, il se posait là, il suffisait de simplement détourner son attention pour qu’il oublie la douleur. Ce qu’il faisait quasiment en permanence au final. Il s’arrêta en plein milieu du couloir, voyant le précepteur de l’équipe Delta arriver de l’autre côté, levant les yeux au ciel et accélérant le pas. Madhi fit volte-face et courut vers ses amies.

“Fuite, Fuite! Y a un ‘roooos tank qui arrive!”

Il exultait en rigolant, il entraîna à sa suite les deux comparses qui avaient proposé de jouer. Bon en fait Eva n’avait rien proposé du tout, mais elle tenait la main de Yuki non? C’était suffisant pour que Madhi l’associe à la proposition de jeu.
Ils trouvèrent refuge, un embranchement plus loin dans un placard à balais. Vu leurs courtes pattes, ils n’auraient pas pu semer le précepteur autrement. Amusé ce dernier les avait rattrapé, mais les laissa quelques instants dans le placard, écoutant à la porte ce que pouvait raconter ces marmots.
Madhi écoutait à la porte, mais il n’entendit pas le précepteur, normal, ce dernier était immobile, contre la porte. Alors le petit garçon se retourna vers ses deux amies et s’assit par terre en tailleur, au milieu de tous les ustensiles de nettoyage, et fit des grands gestes en se redressant pour se donner un air “plus adulte”.

“Okay tu fais le Toubleu, mais si je suis FinLongFinger, je suis un gentil, alors je te tue pas c’est normal, c’est les méchants qui tuent !”

-

Evangéline s'était laissée entraîner un peu à contre coeur. Dans le placard à balais, elle regardait Madhi faire le pitre et se prendre pour un adulte. Elle commença à tordre ses doigts en se mordant la lèvre. Elle ne voulait pas avoir plus de problèmes. Assise par terre, elle baissa la tête vers ses pieds. Evangéline savait que le précepteur n'était pas loin, qu'il devait très certainement attendre qu'ils sortent pour les punir d'avoir fait des bêtises. Mais pour le moment, ils étaient tous les trois dans ce placard, à l’abri.

_J'ai pas envie de jouer au Toubleu… C'est pas rigolo la guerre.

Elle continuait de martyriser ses petits doigts. Elle les tirait, les tordait sans état d'âme.
Évangéline leva des yeux tristes à demi caché par une épaisse frange vers Yuki et Madhi. Jouer au Toubleu… Quel drôle d’idée.

_J’aimerai qu’on joue à la paix. Juste la paix…

Évangéline se frotta le visage à deux mains.

_Et rester cachés loin des autres.

-

Yuki aperçut les yeux tristes et inquiets d'Eva. Un jeu n'est amusant que si tout le monde rit. Elle s'accroupit devant elle en penchant sa tête sur le côté. Elle poussa un peu la frange d'Eva pour voir ses yeux et lui dit :
“Beh c'est pas grave. On peut jouer à un autre jeu. On peut jouer à cache cache. Si vous voulez je commence à compter. En plus je suis sûre que t'es trop forte à cache cache Eva !”
Elle regarda Madhi. Elle attendait son approbation pour avoir changé de jeu.

-

Madhi comprit qu’Eva n’était pas d’humeur à jouer à la guerre, mais il n’avait pas compris à quel moment ils avaient parlé de jouer à la guerre. Aussi il leva un sourcil d’incompréhension. Et en se remettant debout, oubliant de chuchoter.

“Mais on joue pas à la guerre, c’est pas un jeu ça.”

Madhi lève ses mains remplies de crayons, avec un air de défi, une idée de génie (enfantine) se reflétant dans ses yeux mutins.

“On va colorier le monde! Et avec la foudre, YukiBleu va allumer les ampoules du ciel! Tout brillera à nouveau!”

Il ouvrit grand les bras vers le plafond pour illustrer son propos, mais il avait noté l’air soucieux d’Eva et Yuki aussi, elle proposait de passer à un autre jeu. Cache-cache, ils avaient déjà commencé mais Madhi acquiesça.

“Okay, mais d’abord, on change de cachette!”

Il ouvrit la porte et sentit immédiatement une résistance, il leva les yeux au ciel et vit Samuel, leur précepteur, le regarder avec un sourire amusé. Il sortit comme si de rien n’était et se planta à côté du précepteur dans le couloir. Puis soudainement il s’écria.

“Courez!” Il se tourna vers Samuel et lui fit une grimace en criant.
“Nikeutaras!”

Il fit demi-tour et s’élança le plus vite qu’il put. Et là un miracle se produisit, il accéléra tellement fort qu’il n’avançait plus vers l’avant, mais vers le haut! Il tendit les bras sur les côtés.

“Oooooh je vole, wouuuuuusssshhhhh!”
Samuel”Madhi ce n’est pas bien de parler comme cela.”

Madhi sentit enfin la poigne de Samuel dans son dos qui le maintenait énergiquement dans les airs.

“Maiiiiis, c’est le monsieur à la tête de bite qui l’a dit, c’est pas moaaaa.”

Fidèle à son hyperactivité, il se tordait dans tous les sens, jusqu'à se retrouver roulé en nem sous le bras vigoureux de Samuel, il essayait de s’échapper, mais même en forçant avec ses bras pour s’expulser comme un bouchon de champagne, pas moyen…

“Diiiiis Samuel?”

Vaincu, mais infatigable, il se laissa porter, en dodelinant de la tête, des bras et des jambes en regardant le sol et en faisant faire le yoyo à un filet de bave.

“Sluuuurp, diiiis, toi aussi t’as une tête de bite qui plaît aux fmmmmmh???”

Samuel se vit contraint de le bâillonner avec son autre main, levant les yeux aux ciel pour la énième fois, s’il ne choppait pas un strabisme avec le temps, il pourrait s’estimer heureux.

-

Dans un premier temps, quand Madhi s'extirpa du placard, Évangéline se tapit dans l’ombre. Elle n'avait pas envie que le précepteur des Delta ne la voit. Son frère lui avait dit de courir, mais elle avait préféré se cacher.
Quand Samuel saisit Madhi, qui ne cessait pas de dire des bêtises - et aggravait son cas, ce benêt ! - elle estima qu’il était temps de sortir du placard.

“Sluuuurp, diiiis, toi aussi t’as une tête de bite qui plaît aux fmmmmmh???”

Évangéline sourit et mit un pied hors de leur abri. Elle recommença à triturer ses doigts en regardant ses pieds.

_Je vais retourner avec les Bêtas. Merci Madhi, merci Yuki. C'était très sympathique.

Elle tourna le dos aux Deltas et à leur précepteur. L’homme fit un mouvement vers elle mais se ravisa. Bizarrement, il la savait… autonome ? Il la regarda s'éloigner en raffermissant sa prise sur le petit hyperactif.
Évangéline eut un petit pincement au cœur lorsqu’elle rejoignit les Bêtas. Mais c'était là une décision des grands.

-
Yuki sorti du placard en dernier, une fois Samuel parti.
“- Bah… On joue plus ?”
Elle voyait le précepteur s'éloigner avec Madhi qui gigotait comme un poisson hors de l'eau. Cet homme avait une patience d'ange avec ces enfants, malgré les misères qu'ils pouvaient lui faire.
Eva était retournée avec les Bêtas. Yuki ne comprenait pas trop pourquoi les différentes équipes ne se mélangeait pas plus souvent. Même tout le temps. Tout le monde reste en groupe, même parfois quand les grands les réunissent.
Elle rejoignit ses autres camarades dans la cour. Elle avait des dettes à rembourser pour le service de tout à l'heure. 4 bonbons, porter un sac sur le chemin du retour, un dessin et pousser la balançoire. Akina n'avait rien demandé, mais il aurait un bisou, il l'avait bien mérité. Après avoir “payé” le plus de choses qui lui était possible de faire sur le moment, elle se retrouva sans jeu, un peu touchée par l’ennui.
Alors Yuki regarda, à l’intérieur de la salle, la table encore couverte de feuilles censé accueillir un dessin collectif géant.
“Madhi a eu une super idée, dommage qu’on n’ait pas pu le finir. Madhi a toujours de trop bonnes idées pour qu’on joue ensemble.“
Quand Yuki vit le pot de craie posé sur la table du professeur, elle eu une super idée.
Elle rentra discrètement dans la salle, attrapa le pot, retourna dans la cour pour le cacher dans une super cachette. Puis elle s’assit devant, comme une poule couvant son bien le plus précieux.
“Voilà, comme ça quand Madhi sera dépuni, il pourra convaincre les autres, et on pourra faire le plus grand dessin du monde dans la cour !”

Madhi prit un moment l'air sur le toit, il n'en pouvait plus de ses réflexions qui le ramenaient toujours au même constat, toutes les impasses lui embrumaient l'esprit. Il voulut retrouver le bruit sourd des ventilations des bâtiments de Pôle Sud, et le plafond de métal mêlé à la glace. Il s'assit sur un rebord du bâtiment et se mit à regarder distraitement les rues vides alentours.

Faisant balancer ses jambes nonchalamment, il se demandait s'il devait intervenir sur ce sujet aussi. Après tout, il comprenait complètement la réaction du personnage. Mais une discussion n'engageait à rien.

-"En plus, le connaissant, il ne doit pas être en train de dormir, malgré l'heure..."

Madhi enfila sa resplioid et demanda une connexion avec le canal de celle d'Adamas. Sans trop savoir quoi annoncer par message, il calibra sur le vocal et attendit, tout simplement.

-

Adamas, était allongé depuis des heures sur le toit gelé... il repensait inlassablement les mots de Selina depuis son retour et ses aveux... la vérité tout:

"Arrête de jouer Adamas, tu vaux mieux que ça... soit un homme desormais"

La resplioid vibra.. il réfléchit et fini par répondre dans se douter de qui aller répondre.

-

Le signal mit un certain temps à être établi, Madhi s'attendait à vrai dire possiblement à un mutisme de la part de son frère bug. Il l'aurait compris, mais au final, la tonalité changea, le canal était établi.

-"Adamas? C'est Madhi, on est seulement deux sur le canal, je voulais te parler en privé, et cela reste encore le meilleur moyen, à moins que tu ne veuilles en parler de vive voix..."

Madhi voulait éviter de dire que lui aussi pensait que les conversations des Resplioids pouvaient être enregistrées à mauvais escient, mais il ne lui semblait y avoir rien à cacher dans le sujet qui l'intéressait. Par contre peut-être qu'Adamas, lui, voudrait éviter cela.

-"J'ai appris ce que tu comptais faire, je voulais te demander s'il était possible que tu m'en parles. J'aimerais bien savoir ce qui te tracasse, même si j'en ai une bonne idée ... Toi seul peut me l'expliquer avec tes mots."

-

Adamas écouta Mahdi sans un mot.

(Bien sûr que les conversations sur les resplioids peuvent être enregistrés)

Il hésita un instant et fini par répondre d'une voix très froide et complètement différente de ce que Madhi avait entendu jusque là, une voix grave, douce mais aussi sans une once de chaleur, une voix éthérée comme sortie d'un rêve trop long:

" Retrouvons nous à la base."
(Tu abuses Adamas tu pourrais l'inviter à l'appartement)
(Oui mais je n'ai pas envie qu'il voit Selina à eux deux il me ferait trop de reproches... trop de voix, trop de bruit)
(Alors la base?)
(Oui la base, sera un endroit parfait)
(Et un bar tu en penses quoi ?)
(Trop de bruits, trop de gens, trop)
(Un toit non ?)
(Surtout pas, Mahdi veut parler, et sur un toit je ne parviendrait pas à me concentrer sur la conversation)

Le silence se poursuivit longuement sans que un mot de plus ne soit échangé entre Adamas et Mahdi.

- "Oui la base sera parfait renchérit-il de nouveau"
( et l'heure Adamas tu vas oublier l'heure ?)
- "J'arrive dans 25 minutes, il sera donc 20h00... à tout de suite"

-

Madhi écoutait attentivement le flot lent des paroles d'Adamas, il se doutait bien qu'il devait être très songeur lui aussi. Toujours dans ses pensées, et elles devaient foisonner en ce moment-même. Ou peut-être était-il juste calme...

Il attendit que son frère eut fini et il déclara.

-"Parfait, la base, à tout de suite."

Madhi ferma son manteau et descendit du muret, il se mit à parcourir l'escalier du bâtiment, un regard en arrière, mais à cette heure-ci, avec aucune raison de penser l'inverse, Sauveuse ne risquait rien. Il se mit à déambuler lentement dans la ville, il serait à la base dans moins de 20 minutes. Il prit donc son temps pour se replonger dans ses pensées.

Il arriva rapidement à la base et s'adossa à un mur contre la base, en ayant salué le garde en faction lorsqu'il le dépassa. Il croisa les bras, le regard perdu entre ses pieds. Il s'était mis en vue pour qu'Adamas le repère et qu'ils puissent aller à l'écart ensuite. Prêt à l'écouter.

En attendant il ruminait, fixant le sol.

-

Adamas perché sur un toit non loin de la base n'eut aucun mal à repérer Mahdi, celui ci semblait seul.

Il écrit à ce dernier un moment en silence sans même se manifester, et si il choisissait de partir ? Non... cela n'était pas juste...

(Des constantes et des variables Adamas... des constantes et des variables) se répétât-il...

Il se faufile alors de toit en toit en direction de son frère d'arme et le rejoint finalement près des ombres... sans un mot il lui désigna le chemin...

Les toits de Pôle Sud... aucun murmure ne filtre des toits.

"Suis moi."

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L'attente paru durer seulement quelques secondes, et peut-être était-ce le cas. En tout cas Madhi ne remarqua pas instantanément l'ombre dans la périphérie de sa vision. Adamas était vraiment discret, et lui vraiment distrait. Mais en voyant le sérieux de son frère, il ressentit une tension supplémentaire. Même à Pôle Sud on ne se sentait pas en sécurité finalement. Quelle oppressante sensation...

Madhi Suivi Adamas sans dire un mot, pour ne pas faire plus de bruit que nécessaire, il emprunta pas à pas le même chemin que l'ombre. Ils finirent par arriver sur les toits, et lorsqu'ils furent enfin en un lieu qu'Adamas jugeait sûr. Madhi relâcha la pression d'un souffle, haussa les épaules et se tourna vers le tout récemment gradé capitaine de la résistance.

-"Alors dis-moi, qu'est-ce qu'il se passe? Pourquoi rester?"

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Adamas contempla les lumières de Pôle Sud depuis les toits et observa un long moment de silence, la voix de Mahdi l'irritait au plus haut point, mais il choisit de s'apaiser, de prendre son temps...

(Attention Adamas... Tu vas recommencer à chantonner si tu t'énerve reste calme réfléchis)

"Pourquoi rester... pourquoi ?"

Et soudain son regard se révéla, il se redresse et regarda Mahdi droit dans les yeux... il n'était pas le Adamas que Mahdi pensait connaître, il n'était pas ce qu'il avait délibérément montré depuis ce temps, du moins pas complètement, et sa voix trancha le silence comme une lame... une voix froide... celle d'un méthodique... celle d'un calculateur... celle qu'il ne révélait qu'une fois les pions en place et qu'il avait compris à qui il avait à faire:

"Je ne reste pas à Pôle Sud Mahdi... j'ai discuté longuement avec Selyna et elle m'a ouvert les yeux... mais que les choses soient claires... Je déteste ce que les événements récents ont fait de moi... Je déteste avoir envisagé de massacrer les meurtriers de Sword."

Le regard d'Adamas s'attarda sur les lumières de Pôle Sud une nouvelle fois... savourant le silence et appréciant ce calme qu'il recherchait si âprement.

(Vous prétendez vous soucier des gens, de ceux qui vivent ici et de tous les autres mais j'ai vu votre visage..votre vrai visage... j'ai passé du temps a vous étudier et j'ai compris)

Adamas chantonnait... paisiblement depuis plusieurs minutes et finalement il s'interrompt d'un geste ferme du poing, un ancrage qui le ramenait à la réalité:

" J'ai passé du temps à vous observer alors que vous me pensiez plus fragile et j'ai vu votre équipe... Et encore une fois... Je suis déçu.. pourtant même en lisant vos comptes rendus de missions... Je ne m'attendais à rien... vous avez oublié vos morts... Akina et Fabula, vous vous noyez dans vos émotions et agissez comme des enfants... vous peine à la paix et l'amour mais êtes incapable de lire la souffrance de vos proches... vous avez laissé Lyanna seule dans sa souffrance pour vivre vos amourettes ridicules alors que votre leader est affaiblie et laissée seule. Vous agissez de manière inconséquente et sans préparation... nouait des alliances avec ceux qui veulent notre mort sans même préparer une stratégie en cas de trahison... vous vous comportez comme des enfants... mais il est temps que vous vous rappelez que vous êtes des Bugs et que des gens compte sur nous..."

Adamas ferma les yeux un instant et respira profondément, et regarda de nouveau les lumières de Pôle Sud.

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Bien que de longs intervalles de silence ponctuaient les phrases d'Adamas, Madhi avait l'impression de se faire enchaîner de coups, il y avait le regard et l'absence de regard qui voulait tant en dire. Le frisson qui lui parcourut l'échine était assez désagréable, celui que l'on a lorsqu'on est face à un danger. Le pragmatisme froid de son frère était tempéré par sa volonté de bien faire. Mais peut-être qu'un jour il basculerait plus d'un côté, et ce jour-là... quelles en seraient les conséquences, Madhi trembla.

Il encaissa les reproches sans broncher, comment contredire le comportement, envahi par ses émotions? En permanence. Se comporter comme un enfant? Dès qu'il le pouvait. Laisser Lyanna seule? Il l'avait fait aussi...
Il attendit la fin du sermon avant de se mettre à parler.

-"Je ne peux pas te contredire sur plusieurs points Adamas, et même si je le pouvais je ne le voudrais pas."

C'était difficile de se faire sermonner, il pensait pourtant bien travailler sur son égo, mais il avait toujours du mal à remettre tout cela en question, à prendre du recul. Aussi il mit un certain temps avant de reprendre.

-"Je sais que je suis un idéaliste, peut-être même plus que Yuki, je sais que les chances de zéros pertes sont infinitésimales. Je sais que mon caprice ne changera pas le déroulement des évènements, et que je ne suis clairement pas le stratège qu'il faut maintenant."

-"En ce qui concerne l'alliance avec les Quadrillas, je ne suis pas impartial loin de là, je maintiens qu'il faudrait les maintenir éloignés des affrontements pour une bonne raison. Non seulement pour les protéger, mais si en plus ils ne font pas de dégâts, tout le monde en profitera. De toutes façons, en pensant rationnellement, ils sont incontrôlables physiquement, ils passeraient dans l'ombre-monde. Les tuer, je m'y oppose formellement, quant à un plan au cas où ils nous trahiraient, je pense que tu es bien mieux qualifié que moi pour ça...
Quant à Lyanna, je le déplore crois-moi, mais je n'arrive pas à l'aider, je ne sais pas comment faire, je me sens démuni. Être là n'est pas suffisant, parler, elle n'y tient pas, et je ne peux même pas lui offrir mon écoute, elle ne se confie pas... Ou pas à moi en tout cas."

Il posa ses mains sous son menton et s'accouda au rebord le plus près.

-"Oui, on est des enfants Adamas, je ne crois toujours pas avoir réalisé l'ampleur de ce que nous réserve la vie en tant qu'adulte, je crois toujours fermement en mes idéaux, je n'ai pas l'expérience de Ganymède et nous serons toujours des enfants aux yeux des immortels, et je le resterai probablement aux tiens...
Et c'est pour cela que l'on a besoin de toi, comme Lyanna, tu es capable de porter un poids que je n'arriverai probablement pas à ne serait-ce que soulever.
Ce qui arrive demandera sûrement un point de vue plus pragmatique, et quand "les enfants" n'arriveront pas à prendre la bonne décision, "les adultes" seront capables de le faire."

Tu as les épaules pour ce qui est le plus dur, et je suis désolé que cela pèse sur toi."

Madhi savait tout cela, il espérait pourtant toujours que la non-violence vaincrait...

-"Au-delà des Quadrillas des bugs, des forces armées de l'Omicron et de la résistance. Cette bataille sera dévastatrice, et il faut tout faire pour minimiser les dégâts, mais il y a pire, aussi impossible que cela puisse paraître."

Un soupir

-"Miphos va probablement nous utiliser à ses fins, et il faut trouver un moyen de contrer sa stratégie. Peut-être que tu pourrais trouver la parade, toi."

-

Adamas soupira, le regard plongé dans les lumières, les yeux rivés sur les couleurs dansante de Pôle Sud...

(Tu ne comprends rien n'est ce pas... Et c'est supposé être moi qui ai un problème)

Il réfléchit un long moment. Comment lui transmettre le message ?

(Tu devrais le prendre dans tes bras, le rassurer... ça marche avec Selina après tout)
(Non il n'est pas Selina)

Le temps s’écoulait et les mots se précisèrent dans le cerveau de l'homme en rouge:

"Tu es ridicule. Bien sûr que je veux la paix et le moins de dégât possible pour chaque camp je ne suis pas un monstre (même si on m'a toujours pris pour une sorte de bête étrange), et avec le temps je m'y suis habitué, je n'ai pas besoin d'amis... Je n'ai pas besoin que l'on me narcissise, ni que l'on me réconforte, j'ai toujours été seul et je sais que le jour où je mourrai se sera seul et probablement incompris... Je l'ai accepté depuis le jour où j'ai pris ma différence droit dans la figure."

Il fit une pause dans son discours, et détourne les yeux de Mahdi, peut être pour cacher ses larmes ou peut être etait-ce son mépris:

"Quoiqu'il en soit, il est hors de question que Lyanna et moi soyons les seuls à agir de manière responsable et à nous préoccuper réellement de l'équipe et Pôle Sud sous couvert de vos comportements puéril et ridicule. L'humanité mérite mieux que ça, nous méritons tous mieux que ça. Il est grand temps que vous agissiez de manière responsable...
... nous portons un fardeau très lourd Mahdi... Et avec ce qui approche il est voué à s'alourdir encore et encore... Je ne suis pas très doué pour le travail d'équipe mais je sais une chose. Un fardeau est toujours plus léger quand il est porté par tous et non quelques individus..."

Adamas se retourna vers Mahdi, le regard froid, fataliste et épuisé... cerné et qui témoignait de sa volonté inébranlable:

" Tu es un lâche de me proposer de prendre seul la responsabilité de votre bêtise... cela montre une nouvelle fois votre égoïsme supposément altruiste. Quand as tu réellement mis ta vie dans la balance pour tes idéaux ? Tu préfères risquer celles des autres pour tes décisions... tu géreras des blessés et d'autres seront au contact... combien de Fabula pour te protéger ? De Lyanna pour les responsabilités ? Combien d'esprit Delta pour palier à votre inconséquence ?"

(Tu es dur dur...)
(C'est nécessaire... )

Adamas s'approcha de Mahdi d'un pas ferme... il approche sa bouche de l'oeil de ce dernier:

" Tu penses continuer combien de temps à te cacher derrière les autres ? A ne pas mettre ta vie dans la balance mais celles des autres ? De Pôle Sud... d'Evangeline et de Yuki, de Lyanna..."

Adamas tremblait:

" Pour protéger Pôle Sud, les Bugs et celle que j'aime, je suis prêt à mettre ma vie dans la balance et je le fait... Je suis prêt à mettre mon âme dans la balance et mes idéaux de paix... et si il le faut absolument... Je deviendrais un monstre dont le nom sera prononcé avec mépris et sur lequel on crachera... tel est mon fardeau Mahdi... celui que des gens comme toi me transmettent pour des idéaux qu'ils ne savent pas défendre ou des vies et des sacrifices qu'ils ne sont pas prêt à prendre pour leurs idéaux...."

Adamas se detourna de Mahdi et approche du rebord du toit une nouvelle fois, seul:

" Tu ne peux aider personne Mahdi, tu ne sais même pas t'aider toi même "

-

Madhi écoutait Adamas sans broncher, mais il était mal à l'aise, il recevait beaucoup de cette colère du bug, très empathique, surtout une colère contenue par un personnage aussi discret, quand ça éclatait c'était quelque chose. Mais au final, il éclata d'un rire, nerveux, inadéquat, qu'il calma aussitôt pour éviter d'éveiller le voisinage.

-"Enfin tu t'énerves, j'ai remarqué que c'est à ces moments que tu es le plus présent."

Il passa la main dans ses cheveux, gêné, pas rassuré du tout, mais comme d'habitude il fallait aller jusqu'au bout.

-"Un lâche, oui probablement, j'ai peur de la guerre, je n'ai pas peur d'aller au contact, j'ai peur de tuer. Quant aux responsabilités, si tu as remarqué, il y a environ deux millions de personnes ici qui ne sont pas prêtes à les assumer. Toi oui, tant mieux, mais si tu crois que c'est en me rabaissant que ça va aider, libre à toi de le faire."

-"Je ne suis pas venu pour qu'on se dispute de savoir qui est le plus courageux, et effectivement je vous rajoute du poids sur les épaules, c'est connard de ma part, simplement je vois bien qu'il y aussi une différence de réflexion et de compétences, ce serait subjectif de le nier. Tu es plus courageux que moi sur certains points, c'est déjà le cas, moi je dois encore le développer."

Il passa sur la remarque comme quoi il se cachait derrière les autres, surtout en combat, visiblement les rapports ne retranscrivaient pas tout.

-"C'est bien de ça que j'ai peur, que l'on pense devoir devenir des monstres pour nos idéaux, ce qui nous en éloigne. Au final la guerre ne finira que physiquement, elle aura toujours lieu entre les peuples, puisqu'ils seront prêts à aller aussi loin pour leurs idéaux quand ils divergent. En parlant de guerre infinie, le tournant de Paris, il faut qu'on en parle. Même si tu me considères comme une merde sans couilles, j'ai besoin de ton avis et que tu réfléchisse sur un truc."

Être autoritaire n'était pas habituel pour Madhi, mais Adamas montrait clairement que l'on pouvait se passer de pincettes avec lui, autant être direct.

-"Miphos va probablement piéger Paris. Je ne sais pas quelles sont les forces prévues, du côté de la résistance, on ne peut probablement pas atteindre Paris depuis Pôle Sud avec les troupes régulières en seulement trois semaines, à moins qu'elles ne soient déjà parties.

Mais quand bien même, si on y allait seulement entre bugs avec nos resplioids. Il a probablement prévu le coup. La guerre est surtout politique comme nous l'a dit Orion. Bien que j'ai un doute sur le type...
Concrètement Miphos risque de faire péter une partie de Paris, et nous faire passer pour les terroristes, dans nos armures et notre colère affichées, avec les médias dont il dispose, enterrant encore plus la résistance. Surtout s'il perd la bataille.
On ne peut pas supposé qu'il n'a pas prévu plusieurs coups d'avance, et celui-ci serait un des plus logiques."

Avant d'aller plus loin, il attendait la réaction d'Adamas, d'autres suppositions...

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Adamas figea son attention sur la rue en contrebas... les mots de Mahdi témoignait son incompréhension... encore... ça devenait compliqué de se faire comprendre et assez lassant. L'homme en rouge soupira contenant sa tristesse, cette incompréhension des autres qui lui valait toujours des remarques inappropriées:

" Mahdi, à mes yeux tu n'es pas sans valeur... ni toi... ni aucun autre. Je ne suis pas en colère et n'ai pas besoin de te rabaisser... ce sont des concepts que je ne connais pas et que je ne comprendrais jamais malheureusement. Je ne suis pas comme les autres... Je ne suis pas comme vous... c'est peut être pour ça que je ne peux pas être compris et que je préfère être seul... c'est plus simple... ça nécessite moins de conversations d'être seul... moins d'explications et je peux profiter du calme sans avoir à m'expliquer. Sais tu ce que c'est d'être seul en permanence ? De ne pas être compris, ni dans ses intentions ou ses mots ? Pour moi c'est toujours comme ça... "

Être différent n'est jamais simple, être seul non plus... Adamas en ressenti une profonde mélancolie et se mit à chantonner "Quiet" pour s'apaiser.

( je veux juste que l'on me comprenne... pas que l'on m'entende... peut être que ce n'était pas une bonne idée finalement de venir ici pour discuter avec quelqu'un)
(Il a parlé d'une stratégie à mettre en place pour Paris, mais je suis fatigué... tellement fatigué... Je dois y penser seul... si il a besoin de moi je peux bien faire ça)

Adamas cessa de chantonner et s’apprêta à quitter le toit sans même dire un mot à Mahdi...

(Tu oublis rien ?)
(Quoi ?)
(Tu le laisses comme ça ?)
(Ah....)

"Bonne soirée Mahdi je vais réfléchir à ce que tu m'as demandé."

-

Le changement de ton et de conversation surprit Madhi, apparemment Adamas ne voulait plus secouer Madhi. Étonnant d'être allez aussi loin dans les mots et de s'arrêter brusquement. Peut-être que le jeune bug avait dit quelque chose de travers qui avait blessé son frère... Malheureusement il ne voyait pas quoi. Et puis pourquoi s'il n'avait pas besoin de le rabaisser, pourquoi lui balancer ces remarques cinglantes, le faire réagir? C'était le cas, mais apparemment ça ne suffisait pas. Adamas ne semblait pas satisfait.

-"Non effectivement je ne connais pas la sensation... Mais en t'isolant et sans expliquer longueeeemeeeent, ça n'ira malheureusement pas en s'arrangeant. J'espère que Selina y arrive mieux, je l’espère sincèrement."

Madhi ne proposa pas d'être une oreille pour ses explications, Adamas avait déjà clairement prit la décision de ne pas s'expliquer, rester énigmatique et il tournait déjà les talons. Madhi respectait cela, il s'estimait déjà content d'avoir eu une conversation avec le bug. Ce qui était rare et toujours court. Il ne savait même pas au final, s'il viendrait à Paris. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne resterait pas à Pôle Sud... En même temps, s'il ne venait pas à Paris, Madhi s'inquièterait pour une personne de moins, ce serait plaisant de le savoir à l'abri.

*Oui enfin, j'aurais bien aimé qu'on en discute tous les deux, mais bon, du coup on va tous venir avec des idées différentes, et encore une fois pas le temps de les comparer et d'en discuter... On fera avec...*

Madhi ne retint pas Adamas, il lui souhaita bonne soirée en retour, espérant qu'il trouve un peu plus de sommeil qu'à son habitude. Ce temps mort dans les cogitations incessante de son frère devait lui faire le plus grand bien. Dommage qu'il en soit si souvent privé. Il soupira, décidément écouter n'était pas son fort, lorsque c'était une blessure physique c'était facile, mais les symptômes psychologiques, c'était autre chose. Ce qui le mina encore plus, non seulement il ne comprenait pas et n'arrivait pas à aider Lyanna mais Adamas non plus, ce qui lui fit l'effet d'une petite gifle.

*Je perds de vue les choses importantes si facilement, si en plus de ne pas trouver des solutions pour cette bataille, je deviens un ami si médiocre, je me demande bien à quoi tout cela aura servi ...*

Il quitta le toit dix minutes après le départ d'Adamas. Retournant dans ses réflexions, PARIS en lettres majuscules, et les noms de Lyanna et Adamas en orbite autour, venant le perturber de temps en temps, d'une culpabilité récalcitrante.)