Jobless, hopeless...

16 Déc 2011 00:15 #12655

Hop, pour tout les fans de Jobs (paix ait son âme!) et de Mac, il y avait un article intéressant dans Métro qui présentait l'IPad 2 comme le cadeau qui serait le plus offert pour Noël (comme quoi, la crise semble être derrière nous!).

L'article parlait aussi de FOXCONN la filiale chinoise qui fabrique 2/3 des IPad sur une surface grande comme Monaco.
Outre les récurrents problèmes de pollution (la Chine n'est pas réputée pour sa sensibilité écolo), l'article parlait des ouvriers des chaînes IPad qui travaillent 12h/jour pour 230€/mois.
Ils mangent FOXCONN, se déplacent FOXCONN et dorment FOXCONN, du coup leur salaire revient très rapidement à FOXCONN. Bref, le type d'esclavagisme moderne que dénonçait déjà Zola dans les mines nordistes...

Pour ces chinois là , Jobs a vraiment été un mac... :huh:

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16 Déc 2011 08:19 #12656

Pas besoin d aller jusqu'en Chine pour trouver des injustices. Il doit bien y avoir un clochard en bas de ta rue que notre société à laisser sur la paille. Et tu/vous faites quoi?

Notre société de sur consommation est très facile à critiquer mais quelle est la solution?

On tue tous les patron qui "exploite" les gens ?
À partir de quand est on exploité ? Et si ils étaient payé 3000€ par mois tu/vous diriez la même chose ?
Et il vivait de quoi le chinois avant de bosser pour jobs ?
Est ce que d être au service de quelqu'un c est de l'esclavagisme ?

Tous les modèles de société sont passés par des phases ou des hommes ont été au service d autre. Lire kanui-den de sanpei shirato un manga sur le système féodale au Japon.
Facile de voire le monde dans notre canapé, au chaud, avec nos yeux d européens, mais malheureusement (ou heureusement) la façon de vivre des chinois n est pas la même que nous.
Sur un plan économique nous n en somme pas au même point. Il sont en "retard" par rapport à l Europe, au états unis et au Japon (pour ne siter qu eux) mais c est normale ils n ont pas connu le même essorât économique que ces pays. Attendons 10 ans et on verra ou ils en sont et si c est pas l Europe qui deviendra la main d œuvre de la Chine.

Je repose ma question d un autre post. Tu penses pas qu il est plus content le chinois de bosser pour Mac et de pouvoir ramener un salaire fixe tous les mois pour faire vivre sa famille, que de vivre entre 4 plaques de tôle ondulé à survivre comme il peut car il n à eu que des filles et ne peut pas les marier car il n'a pas assez d argent ou de bien pour la dote ? Et il est pas content de voir qu en même temps que son usine de x ha, on a construit une école pour ses enfants ?
D accord il gagne 230€ par mois, pour vivre à Paris c est sur c est pas gagné, mais pour vivre en Chine ? Il est de combien le salaire moyen ? Et le coût de la vie ? Et la croissance économique de la Chine est elle a 0,5% comme en France ?

Pour info un article de la tribune de cette année:
"Le revenu moyen annuel d’un ouvrier chinois est de 1000 euros, soit un peu plus de 83 € par mois. Ce montant à tendance à augmenter régulièrement, surtout sur la côte Est de la Chine (partie la plus active et où la croissance est la plus forte)."

Je pense que comme pour tout avant de lancer des pavés dans la marre, faut analyser deux trois trucs.

Et franchement un monde dans lequel 6 milliards de personnes se tourne les pouces en gagnant 3000€ par mois sans rien faire, c est sûrement beau mais j y crois pas.....

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16 Déc 2011 08:33 #12657

En France le smic doit être à environ 1500€
Donc si on ramene ça a la Chine notre ouvrier chez Mac gagne :
230€/83€
X/1500€

Soit 2,77 x 1500 = 4156 €

Je veux bien gagner la même chose en France

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16 Déc 2011 08:37 #12659

Il est de combien le loyer que fait payer Foxconn.? Il serait pas prélevé à la base par hasard ? Donc avantage en nature, donc pouvoir d achat plus important. .!!

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16 Déc 2011 08:41 #12660

Une autre info, en Chine les impôts sont prélevé avant salaire. Donc c est 230€ net et net d impôt !!!

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16 Déc 2011 08:42 #12661

Vous voulez d autres info sur l économie chinoise?

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16 Déc 2011 09:07 #12662

Et puis dans un œuf y a du blanc et y a du jaune, mais si on perce le jaune, ben il ne reste plus que du jaune :P

Ah !!! La suprématie chinoise

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16 Déc 2011 09:36 #12664

Nan mais Damien y a quelque chose qui m'embête vraiment dans cette mise en avant des "avantages financiers" de travailler chez Foxconn pour construire les iTruc des occidentaux : on dirait que tu estimes qu'un salarié bien payé doit tout accepter. Qu'Apple (et les autres, hein, Jobs n'est qu'un symbole tant il a poussé la chose à l'extrême) peut se dédire des répercussions sociales et environnementales de la production de ses produits.

Parce que bon, voilà ce qu'on peut lire sur la joie de travailler chez Foxconn :

"L’année dernière, une vague de suicides parmi les ouvriers de Foxconn a fait scandale – avant d’être enterrée sous des tonnes de sable et de silence. Dans les usines de cette multinationale chinoise sont assemblés iPad, iPhone et iPod. En réalité, les morts avaient commencé avant, en 2007, et ont continué par la suite (le dernier suicide certain remonte à mai dernier ; un autre ouvrier est mort en juillet dans des circonstances suspectes). Au total, une vingtaine d’employés se sont tués. Des enquêtes de diverses origines ont indiqué parmi les probables causes les rythmes de travail infernaux, le manque de relations humaines à l’intérieur de l’usine et les pressions psychologiques émanant du management. Quelquefois, c’est même allé bien plus loin que des pressions psychologiques : le 26 juillet 2009, un salarié de 25 ans dénommé Sun Danyong, s’est jeté dans le vide après avoir subi un passage à tabac par une équipe de nervis de l’entreprise. Sun était soupçonné d’avoir volé ou perdu un prototype d’iPhone. Quelles solutions a adopté Foxconn pour prévenir de telles tragédies ? Eh bien, l’usine a notamment installé des « filets anti-suicide »"
Source : Article 11 (l'article parle aussi d'Amazon)

Ou encore :
"De l’autre côté du Pacifique, l’empressement n’est toutefois pas de même nature. Sous la férule de petits chefs, et dans des conditions de travail déplorables, les ouvriers des usines Foxconn de Shenzhen fabriquent des ordinateurs de toutes marques, avec des régimes d’assemblage extrêmement répétitifs. L’entreprise, qui est réputée demander à l’homme de travailler plus vite que la machine, a connu de multiples vagues de suicides et d’accidents du travail. Le gouvernement communiste chinois se félicite des prouesses de ce sous-traitant performant, symbole de modernité, qui fabrique un « produit mondialement connu : l’iPhone ». Il passe bien sûr sous silence le sort de travailleurs surexploités et sous-payés — en deçà du minimum nécessaire pour faire vivre une famille chinoise — et ferme les yeux sur les brimades, les insultes et les punitions qui assimilent certaines usines à des camps de travail forcé. En septembre 2010, un rapport indépendant établi sur la base de 1 800 entretiens dans douze usines Foxconn a mis en évidence que les punitions physiques touchaient 16 % des ouvriers.

Sur vingt-neuf entreprises de haute technologie installées en Chine, Apple arrive en bas du classement concernant le respect de normes sociales et écologiques, selon un groupe d’ONG chinoises mené par l’Institut des affaires publiques et environnementales (IPE). « Apple a choisi (...) de continuer à coopérer avec des entreprises qui polluent. C’est profiter indirectement du fait que le coût juridique d’une violation des lois environnementales est très bas en Chine », note leur rapport présenté en janvier 2011 après cinq mois d’enquête. Vingt-sept « sous-traitants supposés d’Apple » y sont épinglés pour des rejets polluants"

Source : Information 2.0 (un blog du Monde Diplo)

Ceci dit, la page wikipédia sur Foxconn se suffit à elle-même...


Ces quelques infos devraient me permettre de pouvoir répondre à ta question :

Damien écrit: Tu penses pas qu il est plus content le chinois de bosser pour Mac et de pouvoir ramener un salaire fixe tous les mois pour faire vivre sa famille, que de vivre entre 4 plaques de tôle ondulé à survivre comme il peut car il n à eu que des filles et ne peut pas les marier car il n'a pas assez d argent ou de bien pour la dote ?

Au vu du nombre de suicides, je ne pense pas qu'on puisse dire que l'ouvrier de Foxconn est plus content que quand il bossait au champs. Parce que c'est de ça qu'on parle : de l'exode rural qui arrive en Chine comme il est arrivé en France.

Ce dont on peut discuter, effectivement, c'est là-dessus :

Damien écrit: Notre société de sur consommation est très facile à critiquer mais quelle est la solution?

C'est simple : arrêter de surconsommer. Et faire gaffe à ce qu'on achète. Clairement on est à la limite du sacerdoce, là, parce que c'est quasiment impossible. Notamment si on veut éviter, par exemple, Foxconn et posséder du matos électronique, vu la liste de fabricants que Foxconn approvisionne :

Apple (Etats-Unis)
Acer (Taiwan)
Amazon (États-Unis)
Asus (Taiwan)
ASRock (Taiwan)
Intel (États-Unis)
Cisco (États-Unis)
Hewlett-Packard (États-Unis)
Dell (États-Unis)
Nintendo (Japon)
Nokia (Finlande)
Microsoft (États-Unis)
Motorola (États-Unis)
MSI (Taiwan)
Sony Ericsson (Japon / Suède)
Vizio (États-Unis)

On peut aussi avoir un regard critique sur le "progrès" tel qu'il nous est vendu : un progrès qui n'est que technologique. Que l'on accepte docilement : fichage volontaire sur Facebook, vidéosurveillance, websurveillance, demain les puces RFID pour nous suivre à la trace , électronisation des voitures histoire d'être dépendant du garagiste, OGM et brevets sur le vivant soit l'acquisition par des multinationales privées du domaine du vivant, etc...
Chaque progrès technique (ou presque) nous fait perdre en autonomie (lire Ivan Illich à ce sujet).
Et il est impossible de revenir en arrière, le progrès technologique bénéficiant d'un effet déclic ; quel état interdirait le téléphone portable même si on découvrait demain que les ondes des portables affectent gravement le cerveau ?

L'autonomie, c'est par exemple retrouver du temps libre et un savoir-faire qui permettrait de fabriquer des meubles soi-même plutôt que de travailler pour gagner l'argent permettant d'acheter des meubles en aggloméré (donc plein de formaldéhyde cacabeurk) réalisés industriellement dans des pays où les considérations sociales et environnementales sont inexistantes. Ce dont on ne peut les blâmer vu qu'ils polluent pour notre "bien-être", ces pays "en développement" (sous-entendu : NOTRE modèle occidental de développement).

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16 Déc 2011 09:51 #12665

Tiens, pour ceux que ça intéresse voilà l'un des textes qui résume plutôt bien comment je vois les choses, écrit en 1974 par, vous le verrez, un putain de visionnaire : André Gorz.

Leur écologie et la nôtre

La prise en compte des exigences écologiques conserve beaucoup d’adversaires dans le patronat. Mais elle a déjà assez de partisans patronaux et capitalistes pour que son acceptation par les puissances d’argent devienne une probabilité sérieuse.

Alors mieux vaut, dés à présent, ne pas jouer à cache-cache : la lutte écologique n ’est pas une fin en soi, c’est une étape. Elle peut créer des difficultés au capitalisme et l’obliger à changer ; mais quand, après avoir longtemps résisté par la force et la ruse, il cédera finalement parce que l’impasse écologique sera devenue inéluctable, il intégrera cette contrainte comme il a intégré toutes les autres.

C’est pourquoi il faut d’emblée poser la question franchement : que voulons-nous ? Un capitalisme qui s’accommode des contraintes écologiques ou une révolution économique, sociale et culturelle qui abolit les contraintes du capitalisme et, par là même, instaure un nouveau rapport des hommes à la collectivité, à leur environnement et à la nature ? Réforme ou révolution ?

Ne répondez surtout pas que cette question est secondaire et que l’important, c’est de ne pas saloper la planète au point qu’elle devienne inhabitable. Car la survie non plus n’est pas une fin en soi : vaut-il la peine de survivre dans "un monde transformé en hôpital planétaire, en école planétaire, en prison planétaire et où la tâche principale des ingénieurs de l’âme sera de fabriquer des hommes adaptés à cette condition" (Illich) ?

Si vous doutez encore que c’est bien ce monde que les technocrates de l’ordre établi nous préparent, lisez le dossier sur les nouvelles techniques de "lavage de cerveau" en Allemagne et aux États-Unis [1] : à la suite de psychiatres et de psycho-chirurgiens américains, des chercheurs attachés à la clinique psychiatrique de l’université de Hambourg explorent, sous la direction des professeurs Gross et Svab, des méthodes propres à amputer les individus de cette agressivité qui les empêche de supporter tranquillement les frustrations les plus totales : celles que leur imposent le régime pénitentiaire, mais aussi le travail à la chaîne, l’entassement dans des cités surpeuplées, l’école, le bureau, l’armée.

Il vaut mieux tenter de définir, dés le départ, pour quoi on lutte et pas seulement contre quoi. Et il vaut mieux essayer de prévoir comment le capitalisme sera affecté et changé par les contraintes écologiques, que de croire que celles-ci provoqueront sa disparition, sans plus.

Mais d’abord, qu’est-ce, en termes économiques, qu’une contrainte écologique ? Prenez par exemple les gigantesques complexes chimiques de la vallée du Rhin, à Ludwigshafen (Basf), à Leverkusen (Bayer) ou Rotterdam (Akzo). Chaque complexe combine les facteurs suivants :

- des ressources naturelles (air, eau, minéraux) qui passaient jusqu’ici pour gratuites parce qu’elles n’avaient pas à être reproduites (remplacées) ;

- des moyens de production (machines, bâtiments) qui sont du capital immobilisé, qui s’usent et dont il faut donc assurer le remplacement (la reproduction), de préférence, par des moyens plus puissants et plus efficaces, donnant a la firme un avantage sur ses concurrents ;

- de la force de travail humaine qui, elle aussi, demande à être reproduite (il faut nourrir, soigner, loger, éduquer les travailleurs).

En économie capitaliste, la combinaison de ces facteurs, au sein du processus de production, a pour but dominant le maximum de profit possible (ce qui, pour une firme soucieuse de son avenir, signifie aussi : le maximum de puissance, donc d’investissements, de présence sur le marché mondial). La recherche de ce but retentit profondément sur la façon dont les différents facteurs sont combinés et sur l’importance relative qui est donnée à chacun d’eux.

La firme, par exemple, ne se demande jamais comment faire pour que le travail soit le plus plaisant, pour que l’usine ménage au mieux les équilibres naturels et l’espace de vie des gens, pour que ses produits servent les fins que se donnent les communautés humaines. Elle se demande seulement comment faire pour produire le maximum de valeurs marchandes au moindre coût monétaire. Et à cette dernière question elle répond : " Il me faut privilégier le fonctionnement parfait des machines, qui sont rares et chères, par rapport à la santé physique et psychique des travailleurs qui sont rapidement remplaçables pour pas cher. Il me faut privilégier les bas coûts de revient par rapport aux équilibres écologiques dont la destruction ne sera pas à ma charge. Il me faut produire ce qui peut se vendre cher, même si des choses moins coûteuses pourraient être plus utiles. "

Tout porte l’empreinte de ces exigences capitalistes : la nature des produits, la technologie de production, les conditions de travail, la structure et la dimension des entreprises...

Mais voici que, dans la vallée du Rhin notamment, l’entassement humain, la pollution de l’air et de l’eau ont atteint un degré tel que l’industrie chimique, pour continuer de croître ou même seulement de fonctionner, se voit obligée de filtrer ses fumées et ses effluents, c’est-à-dire de reproduire des conditions et des ressources qui, jusqu’ici, passaient pour " naturelles " et gratuites. Cette nécessité de reproduire l’environnement va avoir des incidences évidentes : il faut investir dans la dépollution, donc accroître la masse des capitaux immobilisés : il faut ensuite assurer l’amortissement (la reproduction) des installations d’épuration : et le produit de celles-ci (la propreté relative de l’air et de l’eau) ne peut être vendu avec profit.

En somme, il y a augmentation simultanée du poids du capital investi (de la "composition organique"), du coût de reproduction de celui-ci et des coûts de production, sans augmentation correspondante des ventes. Par conséquent, de deux choses l’une : ou bien le taux de profit baisse, ou bien le prix des produits augmente.

La firme cherchera évidemment à relever ses prix de vente. Mais elle ne s’en tirera pas aussi facilement : toutes les autres firmes polluantes (cimenteries, métallurgie, sidérurgie, etc.) chercheront, elles aussi, à faire payer leurs produits plus cher par le consommateur final. La prise en compte des exigences écologiques aura finalement cette conséquence : les prix tendront à augmenter plus vite que les salaires réels, le pouvoir d’achat populaire sera donc comprimé et tout se passera comme si le coût de la dépollution était prélevé sur les ressources dont disposent les gens pour acheter des marchandises. La production de celles-ci tendra donc à stagner ou à baisser ; les tendances à la récession ou à la crise s’en trouveront aggravées. Et ce recul de la croissance et de la production qui, dans un autre système, aurait pu être un bien (moins de voitures, moins de bruit, plus d’air, des journées de travail plus courtes, etc.), aura des effets entièrement négatifs : les productions polluantes deviendront des biens de luxe, inaccessibles à la masse, sans cesser d’être à la portée des privilégiés : les inégalités se creuseront : les pauvres deviendront relativement plus pauvres et les riches plus riches.

La prise en compte des coûts écologiques aura, en somme, les mêmes effets sociaux et économiques que la crise pétrolière. Et le capitalisme, loin de succomber à la crise, la gérera comme il l’a toujours fait : des groupes financiers bien placés profiteront des difficultés de groupes rivaux pour les absorber à bas prix et étendre leur mainmise sur l’économie. Le pouvoir central renforcera son contrôle sur la société : des technocrates calculeront des normes " optimales" de dépollution et de production, édicteront des réglementations, étendront les domaines de " vie programmée " et le champ d’activité des appareils de répression. On détournera la colère populaire, par des mythes compensateurs, contre des boucs émissaires commodes (les minorités ethniques ou raciales, par exemple, les "chevelus", les jeunes...) et l’État n’assoira plus son pouvoir que sur la puissance de ses appareils : bureaucratie, police, armée, milices rempliront le vide laissé par le discrédit de la politique de parti et la disparition des partis politiques. Il suffit de regarder autour de soi pour percevoir, en France et ailleurs, les signes d’une semblable dégénérescence.

Direz-vous que rien de tout cela n’est inévitable ? Sans doute. Mais c’est bien ainsi que les choses risquent de se passer si le capitalisme est contraint de prendre en compte les coûts écologiques sans qu’une attaque politique, lancée à tous les niveaux, lui arrache la maîtrise des opérations et lui oppose un tout autre projet de société et de civilisation. Car les partisans de la croissance ont raison sur un point au moins : dans le cadre de l’actuelle société et de l’actuel modèle de consommation, fondés sur l’inégalité, le privilège et la recherche du profit, la non-croissance ou la croissance négative peuvent seulement signifier stagnation, chômage, accroissement de l’écart qui sépare riches et pauvres. Dans le cadre de l’actuel mode de production, il n’est pas possible de limiter ou de bloquer la croissance tout en répartissant plus équitablement les biens disponibles.

En effet, c’est la nature même de ces biens qui interdit le plus souvent leur répartition équitable : comment voulez-vous répartir "équitablement" les voyages en Concorde, les Citroèn DS ou SM, les appartements au sommet des immeubles-tours avec piscine, les mille produits nouveaux, rares par définition, que l’industrie lance chaque année pour dévaloriser les modèles anciens et reproduire l’inégalité et la hiérarchie sociales ? Et comment répartir " équitablement " les titres universitaires, les postes de contremaitre, d’ingénieur en chef ou de titulaire de chaire.

Comment ne pas voir que le ressort principal de la croissance réside dans cette fuite en avant généralisée que stimule une inégalité délibérément entretenue : dans ce que Ivan Illich appelle "la modernisation de la pauvreté " ? Dès que la masse peut espérer accéder à ce qui était jusque-là un privilège de l’élite, ce privilège (le bac, la voiture, le téléviseur) est dévalorisé par là même, le seuil de la pauvreté est haussé d’un cran, de nouveaux privilèges sont créés dont la masse est exclue. Recréant sans cesse la rareté pour recréer l’inégalité et la hiérarchie, la société engendre plus de besoins insatisfaits qu’elle n’en comble, le taux de croissance de la frustration excède largement celui de la production " (lllich).

Tant qu’on raisonnera dans les limites de cette civilisation inégalitaire, la croissance apparaîtra à la masse des gens comme la promesse - pourtant entièrement illusoire - qu’ils cesseront un jour d’être " sous-privilégiés", et la non-croissance comme leur condamnation à la médiocrité sans espoir. Aussi n’est ce pas tant à la croissance qu’il faut s’attaquer qu’à la mystification qu’elle entretient, à la dynamique des besoins croissants et toujours frustrés sur laquelle elle repose, à la compétition qu’elle organise en incitant les individus à vouloir, chacun, se hisser "au-dessus " des autres. La devise de cette société pourrait être : Ce qui est bon pour tous ne vaut rien. Tu ne seras respectable que si tu as " mieux " que les autres.

Or c’est l’inverse qu’il faut affirmer pour rompre avec l’idéologie de la croissance : Seul est digne de toi ce qui est bon pour tous. Seul mérite d’être produit ce qui ne privilégie ni n’abaisse personne. Nous pouvons être plus heureux avec moins d’opulence, car dans une société sans privilège, il n ’y a pas de pauvres.

Essayer d’imaginer une société fondée sur ces critères. La production de tissus pratiquement inusables, de chaussures durant desannées, de machines faciles à réparer et capables de fonctionner un siècle, tout cela est, dès à présent, à la portée de la technique et de la science de même que la multiplication d’installations et de services collectifs (de transport, de blanchissage, etc.) dispensant chacun de l’achat de machines coûteuses, fragiles et dévoreuses d’énergie.

Supposez dans chaque immeuble collectif deux ou trois salles de télévision (une par programme) ; une salle de jeux pour les enfants ; un atelier bien équipé de bricolage ; une buanderie avec aire de séchage et de repassage : aurez-vous encore besoin de tous vos équipements individuels, et irez-vous encore vous embouteiller sur les routes s’il y a des transports collectifs commodes vers les lieux de détente, des parcs de bicyclettes et de cyclomoteurs sur place, un réseau dense de transports en commun pour les banlieues et les villes ?

Imaginez encore que la grande industrie, planifée centralement, se borne à ne produire que le nécessaire : quatre ou cinq modèles de chaussures et de vêtements qui durent, trois modèles de voitures robustes et transformables, plus tout ce qu’il faut pour les équipements et services collectifs. C’est impossible en économie de marché ? Oui. Ce serait le chômage massif ? Non : la semaine de vingt heures, à condition de changer le système. Ce serait l’uniformité et la grisaille ? Non, car imaginez encore ceci : Chaque quartier, chaque commune dispose d’ateliers, ouverts jour et nuit, équipés de gammes aussi complètes que possible d’outils et de machines, où les habitants, individuellement, collectivement ou en groupes, produiront pour eux-mêmes, hors marché, le superflu, selon leurs goûts et désirs. Comme ils ne travailleront que vingt heures par semaine (et peut-être moins) à produire le nécessaire, les adultes auront tout le temps d’apprendre ce que les enfants apprendront de leur côté dès l’école primaire : travail des tissus, du cuir, du bois, de la pierre, des métaux ; électricité, mécanique, céramique, agriculture...

C’est une utopie ? Ce peut être un programme. Car cette "utopie " correspond à la forme la plus avancée, et non la plus fruste, du socialisme : à une société sans bureaucratie, où le marché dépérit, où il y en a assez pour tous et où les gens sont individuellement et collectivement libres de façonner leur vie, de choisir ce qu’ils veulent faire et avoir en plus du nécessaire : une société où "le libre développement de tous serait à la fois le but et la condition du libre développement de chacun ". Marx dixit.

André Gorz, 1974.

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16 Déc 2011 12:16 #12668

Nous occidentaux, on a tendance à facilement fustiger notre capitalisme, alors qu'on loue notre liberté d'expression. C'est rigolo, parce que les chinois ont choisi d'embrasser le capitalisme, mais se fichent bien de leur liberté d'expression.

Certes, c'était tant que ça leur apporte une croissance à deux chiffres, et c'est en train de craquer un peu de partout, mais il ne faut pas oublier la capacité des peuples à choisir contre leurs intérêts à longs termes.

Et malgré toutes les mauvaises choses que nous méchants occidentaux post-colonialistes avons imposé aux gentils chinois (ironie inside), je pense que ça a accéléré l'alphabétisation et diminué le taux de mariage endogamique (mariage entre cousins). Emmanuel Todd considère ces deux points comme des facteurs importants d'accession à la démocratie.

Je ne dit pas non plus que c'est un mal pour un bien. Mais bref, les chinois sont ni à plaindre ni à diaboliser, je préfère leur laisser faire leur révolution démocratique comme ils l'entendent. Parce que vouloir une nouvelle fois penser à leur place une vision du monde où ils seront plus heureux, bof bof quoi.


Ceci est une signature.
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16 Déc 2011 14:14 #12670

Pour info Apple vient de relocaliser. Ou plutôt de permettre de relocaliser la production de ses processeurs.

En effet après avoir investit 3,5 Milliards de dollars dans son Usine Texane, Samsung US fabrique toutes les puces A5 pour les nouveaux modèles d'Apple.

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16 Déc 2011 20:05 #12678

Rien a répondre à une conversation stérile des le départ.

Votez pour l'utopie d'un monde meilleur.....
La critique est facile mais que proposes tu pour changer....???
Dénoncer sans proposer c est beau et courageux.


Signé: le méchant colonialiste propriétaire d un iPad qui va détruire le monde.....

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16 Déc 2011 20:25 #12679

et tes enfants ils auront quoi a noël??

je suis pas sur qu'ils reçoivent une orange et un jouet en bois "made in france, du commerce équitable, du monde qu'il est beau dans les livres de princesses d'aider son prochain, mais juste avec de fausses appellation pour dire que nous on pense aux pauvres agriculteurs de l'Ardèche profond, que Bruxelles a rendu dépressif a cause des cotas".

On vit pas dans le monde de Oui-Oui.

je te passerai l'expression de la paille et de la poutre dans l'œil, ou celle de la charité vs l'hotipal.


prenez moi pour un méchant colonisateur de droite fascisante, exploiteur de petits enfants, égoiste, et pourfendeur d'ours polaire (de toute facon a quoi ca sert?). Ça me va.

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16 Déc 2011 20:26 #12680

Ouai moi aussi niark niark, c'est mal l'Ipad :P

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16 Déc 2011 21:23 #12681

Il eu été préférable qu'une telle discussion qui divise les points de vue ne naisse pas ici (et conformément à la charte), mais bon, comme dirait JR : c'est fait c'est fait.

Pour rétablir un peu de pragmatisme à cette discussion, il faut je pense voir les choses un peu différemment. Il n'a échappé à personne que les ressources naturelles de notre planète se raréfient et que la ressource humaine explose. Et comme la richesse ne se crée pas ex-nihilo, je reste dans l'idée que les coûts fort bas chinois se font au détriment du coût de main d'oeuvre et pas à celui de la matière première qui se fait rare même chez eux. Ne nous trompons pas, chez eux aussi les prix augmentent rapidement, et à mon avis, 350€ va rapidement pas suffire à vivre décemment. Quand à leur mode de management, la qualité en chine, et la santé au travail : n'en parlons même pas, on est je pense beaucoup mieux chez nous (même si je pense que notre patronat à tendance à tristement imiter le "modèle" chinois). Le taux de suicide évoqué plus haut en témoigne.

Notre société de consommation est très critiquable en effet, et il est je pense aujourd'hui délicat d'en sortir car il faut à la fois agir sur l'économie (macro) et les moeurs des gens au quotidien : le sujet est donc très difficile et casse-gueule, mais pourtant il faudra bien un jour en passer par là. Il faudra apprendre à concevoir plus robuste, consommer moins de matière première pour produire de la richesse, prendre en compte les problématiques d'environnement et de qualité dans tout ça. Toujours est il que, personnellement, je n'opterais pas pour le modèle chinois pour arriver à ces cibles.

Pascal.

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16 Déc 2011 22:39 #12684

Nan mais Damien faut pas le prendre pour toi, parce qu'évidemment qu'on achète tous chinois (rien que trouver un tee-shirt fabriqué en France, c'est du domaine de la quête donjonesque !) ; je ne doute aucunement que la moitié des jouets que Cyriac recevra à Noël sera made in China.

Mais je pense qu'il faut aussi être lucide et ne pas "trouver d'excuse" à Apple, ou à n'importe qui d'autre.

Le boycott des produits chinois, c'est quasiment impossible, de toute façon ; voir cet article sur Rue 89 .
Je n'arrive plus à les retrouver, mais un photographe avait pris la même scène avec puis sans les produits fabriqués en Chine, et c'est assez hallucinant !


Je pense qu'on est assez grands pour en discuter sans se bouffer la gueule, hein :P
(notons que rares sont les jeux de plateau fabriqués en Chine ;-) )

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16 Déc 2011 23:06 #12685

ne le prends pas pour toi pep's, mais prôner la décroissance, milité contre la sur-consomation et fêtes noël avec sa myriade de cadeaux ca fait sourire.

c'est comme fêter noël pour un non croyant....

mais bon bcp oubli pourquoi c'est un jour féerie et qu elles en sont les valeurs. Ca permet au citoyen de base d oublier ses problèmes pendant une soirée....

qu'est ce qu'on fait du père noël ?
symbole de notre capitalisme chérie....

mais préférons critiquer les chinois car de toute façon, on va dire "c'est pas bien", dire "plus jamais ca", mais au final on va pas y aller la bas pour faire changer tout ca, parce qu au final on s en fout pas mal de ses cons de chinois. de toute façon "il marche la tête en bas" n'importe quoi.

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17 Déc 2011 09:03 #12686

Moloch écrit: ne le prends pas pour toi pep's, mais prôner la décroissance, milité contre la sur-consomation et fêtes noël avec sa myriade de cadeaux ca fait sourire.


Ah mais j'en suis bien conscient ; on vit tous avec ses contradictions, et ma conscience n'a aucune chance de gagner contre la joie que j'ai de voir mon loulou s'émerveiller devant son cadeau, ça c'est clair.

Damien écrit: c'est comme fêter noël pour un non croyant....

mais bon bcp oubli pourquoi c'est un jour féerie et qu elles en sont les valeurs. Ca permet au citoyen de base d oublier ses problèmes pendant une soirée....


Au delà de l'aspect religieux, c'est surtout devenu une fête de famille, pour les enfants. Et ça, j'aime bien et je me joins volontiers à la la cohorte des citoyens de base ;-)

Damien écrit: mais préférons critiquer les chinois car de toute façon, on va dire "c'est pas bien", dire "plus jamais ca", mais au final on va pas y aller la bas pour faire changer tout ca, parce qu au final on s en fout pas mal de ses cons de chinois. de toute façon "il marche la tête en bas" n'importe quoi.


Nan mais à aucun moment je n'ai critiqué les chinois ; je critique plutôt, justement, l'attitude des entreprises capitalistes vis-à-vis de la Chine. Enfin ceci dit, je pourrais effectivement critiquer le gouvernement chinois, pour plein de raisons et notamment pour leur absence de réaction sur les conditions de travail de leurs ouvriers.

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17 Déc 2011 21:25 #12699

Oulah Damien, tu vas un peu loin, ne me fais pas de procès d'intentions sans me connaitre. D'autant que ma réflexion ne t'était absolument pas destinée.
Je suis pourtant d'accord avec toi, c'est effectivement stérile de conversé en ce sens. Il devrait être possible de pouvoir exposer un propos sans se recevoir des attaques perso immédiatement et tomber dans les clichés manichéens.
Tu as un discours qui a été servi par les colons d'Algérie et d'Indochine pour justifier leur paternalisme sur les populations indigènes. Ce n'est pas un jugement, c'est juste un peu d'Histoire.
Si tu veux te percevoir comme "un méchant colonisateur de droite fascisante, exploiteur de petits enfants, égoiste, et pourfendeur d'ours polaire":-D , ça te regarde, mas ce n'est pas moi qui te collerai cette étiquette, pas celle là en tout cas. :huh:

Ce n'est ni un appel à la décroissance, ni au boycott. Par mon travail ou ma façon de vivre, je m'inscris plutôt dans une démarche capitaliste et cela me convient. Je pense même qu'un capitalisme modéré est bénéfique puisqu'il crée une certaine émulation.
Maintenant, le capitalisme débridé (qui a dit "des bridés"? :side:) que l'on connait aujourd'hui dans le monde ne me séduit pas. Savoir qu'une poignée d'actionnaires engrangent des millions en profitant du marasme mondial ne me réjouis pas. Je n'arrive pas à me contenter de me réjouir d'être né nanti, pas par culpabilité, mais parce que je trouve plus sympa que tout le monde puisse croquer sa part de gâteau. Alors, je lutte à la mesure de mes moyens (tous petits) pour essayer d'avoir un peu plus d'égalité sociale, au moins à mon échelle et je m'en sors pas trop mal.

Pour ce qui est de Noël, ne vous y trompez pas, c'est purement commercial, car techniquement, d'après les exégètes, le Christ serait né vers la fin Septembre... ;-)
Quand à mes enfants, avant tous les cadeaux, ils recevront de l'amour, ce qui m'est essentiel! (ça doit être mon côté Oui Oui! :-D )

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17 Déc 2011 22:31 #12702

Greg écrit: Pour ce qui est de Noël, ne vous y trompez pas, c'est purement commercial, car techniquement, d'après les exégètes, le Christ serait né vers la fin Septembre... ;-)


Oui mais en terme de marketing religieux ça collait moins avec les fêtes païennes du solstice d'hiver ;-)

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