Jeu de rôle narrativiste - quels retours d'expérience ?

30 Nov 2014 15:53 #42243

Une des grosses tendances actuelles en jeu de rôle, c'est le jeu de rôle narrativiste ou le choix consiste entre autre, d'avoir limite pas de scénario. Quels retours pouvez vous faire sur cette tendance ?

Pascal

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04 Déc 2014 18:41 #42350

Je recopie sans honte un sujet sur Casus No en cours : Des bonnes idées de l'indie à importer

source : www.pandapirate.net/casus/viewtopic.php?f=24&t=25029

Loris écrit: Moi je listerais :
1 - établir les conséquences d'un jet de dé, dans les deux sens, avant de jeter les dés
2 - d'arrêter de jeter les dés dès qu'une compétence correspond (tu cherches tes chaussettes, fais un jet de TOC) et de ne faire que des jets de dés pour des actions CLEF.
3 - découper correctement son histoire en scènes, établir/conclure la scène, faire des flashbacks, du foreshadowing, découper différemment, mettre le spotlight sur chaque personnage, etc.
4 - arrêter les jets de dé en pass/fail et utiliser des nuances bien plus importantes (oui et, oui mais, etc.) ne pas se limiter à réussite vs échec mais avoir potentiellement réussite+/réussite- parce que les circonstances s'y prêtent
5 - une analyse/gestion différente des combats (qu'est-ce que chaque camp cherche à obtenir, clairement. Qu'est-ce que chaque camp mise pour l'obtenir?)
6 - les conséquences de chaque jet de dé doivent apporter quelque chose à l'histoire. Un échec n'est donc pas un barrage mais un rebondissement. Echouer n'est pas forcément ne pas obtenir ce qu'on voulait mais, potentiellement, l'obtenir avec un prix à payer. La réussite n'est pas seulement l'accomplissement de l'action mais une avancée de l'histoire dans le sens qui plaît au joueur. Potentiellement, il est possible que le personnage n'obtienne pas ce qu'il voulait mais mieux que ça.
7 - (et même D&D5 l'implémente, c'est dire si c'est trop indy) établir quelques principes clef du personnage quant à sa personnalité/comportement et mécaniser pour que le joueur les joue.
8 - faire jouer pour voir ce qu'il va se passer et non pour dérouler un scénar


Erwan G écrit: Même si je reste réfractaire au n° 4 (le non et, non, non mais, oui mais, oui, oui et), je partage cet avis.

J'ajouterai une ou deux choses :

  • Donner la main aux joueurs pour définir l'environnement
    Au lieu de faire un jet de TOC pour voir s'il trouve un indice et le lui décrire, le laisser décrire ce qu'il veut trouver ou savoir et lui demander un jet de compétence pour "valider" sa déclaration.
  • Pour les jets relatif aux interactions avec l'environnement, les limiter
    Aka ne pas faire un jet de dés toutes les 2 minutes de discrétion ou de perception, mais en faire un par scène et y appliquer des malus/bonus en fonction de ce que le joueur fait après. Bien sûr, cela nécessite de ne pas prendre les bonus/malus en fonction de ce que l'on veut, mais de façon plus neutre.
  • Accepter qu'un échec puisse se transformer en réussite, contre un coût
    C'est quelque chose que BW préconise et qui est systématisé par Atomic Robo : si tu échoues sur un jet, tu peux le transformer en réussite à condition d'accepter le coût, ie un coût léger si l'échec est faible, lourd si l'échec est important. Ca permet aux joueurs de mieux gérer l'environnement
  • Le Stress
    Et si les points de vie ou autres compteurs des systèmes n'étaient qu'une réserve de stress (physique ou autre), ie ce que les joueurs peuvent encaisser avant de tomber. On peut, dans n'importe quel système traduire cet outil de Fate : lorsque le joueur arrive à 0, il est "Out", le "out" dépendant du conflit. A chaque moment, le joueur peut choisir de prendre une conséquence, ie une "blessure" morale ou physique, pour "acheter" des points de stress.

    Prenons l'exemple du Basic system : le joueur a 12 points de vie, que l'on va dorénavant appeler points de stress. Quand le joueur va prendre un coup, il va pouvoir soit diminuer sa réserve, soit la convertir en conséquence : une mineure diminuera le dommage de 3 points, une moyenne de 6 et une conséquente de 9. Par contre, le joueur aura une "blessure" qu'il pourra essayer de guérir avec le temps ou des soins médicaux. On pourrait même aller plus loin et le faire avec des points de stress mentaux (POU+INT par exemple) pour gérer la santé mentale...

    Bien évidemment, le joueur pourra toujours, à tout moment, tant qu'il n'a pas lancé sa défense, décider de concéder la victoire à son adversaire. Il suffira alors de négocier les conditions de la victoire.
  • L'objet du conflit
    Dans les jeux classiques que j'ai lus, il y a généralement un conflit qui mène à une victoire ou à une défaite, généralement dans le cadre d'un combat physique, où l'on a le choix entre la vie et la mort ou continuer le combat Vs tomber. Mouse Guard m'a donné des outils pour gérer différemment les conflits : on définit ce que chaque partie veut avant de commencer à se mettre sur la figure.

    Accessoirement, tous les conflits sont gérés de la même façon.


Un autre lien en Anglais :
www.gnomestew.com/gming-advice/3-things-...uld-be-in-your-game/

une citation a propos d'Apocalypse World (AW pour les intimes) : "AW c'est juste une formalisation de routines de MJ, ou d'une poignée "d'élus", qui gardaient ça pour eux ." Loosely adapted from Dr Dandy

Acritarche écrit: J'ai beaucoup apprécié le traitement de l'équipement dans Tranchons et Traquons et dans Dungeon World.

Dans Tranchons et Traquons

  • la Besace (ton arme et un objet au début, max 5) qui te permet d'obtenir un bonus +2 à un jet une fois par partie (plus rarement un effet spécial)
  • les Avantages (max. 5) qui octroient un bonus allant de +1 à +5 (et qui peut être un équipement)

Dans Dungeon World
  • les tags qui permettent de définir un objet super rapidement
  • la sacoche d'aventurier: 5 utilisations au choix (ton aventurier s'est bien préparé et a emporté ce qu'il faut)
  • les objets magiques définis avec une Action spéciale (il y a donc des risques/inconvénients à les utiliser)


Udo Femi écrit: C'est d'autant plus possible que pas mal des caractéristiques des PJ sont autre chose que des données chiffrées.
Ca m'aide plus de voir sur une fiche de PJ un Aspect ou un Belief: "Je dois ramener mon père d'entre les morts" que la même chose noyée dans 2 pages de background (mal) écrites tout petit, à la main.

J'ai définitivement basculé vers les JdR avec ce type de Tag/Belief/Aspect/Value/Milestone... marqués noir sur blanc au recto de la fiche de perso lorsque dans une campagne Star Wars d20, j'ai échoué à d'amener des éléments d'intrigue personnalisés vers 2 joueurs (un peu distraits, il est vrai).
Alors que sil ils avaient eus un Tag/Belief/Aspect/Value/Milestone bien visible, genre "La Force est puissante en moi, même si je ne sais pas d'où elle vient" (juste en-dessous des 6 caracs et autres scores à la noix) et que l'interaction avec ce Tag/Belief/Aspect/Value/Milestone ait une influence mécanique, je pense que j'aurais eu une réaction.

On peut bien sûr faire sans, "ça fait 20 ans que je joue/mène comme ça" :roll:
mais que celui qui n'a jamais eu cette frustration (en tant que PJ qui veut jouer sur un élément et que le MJ ignore, ou bien en tant que MJ qui tend moult perches qui restent ignorées) me jette la première pierre.

J'attends.

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14 Déc 2014 20:54 #42495

Je vais faire un parallèle intéressant. J'ai un pote qui fait du théatre d'improvisation. Grosso modo, pour simplifier (en réalité c'est plus complexe) deux équipes de six joueurs s'affrontent, le public vote et donne des points, des thèmes sont donnés, et les joueurs doivent inventer une histoire sur la thématiques en incarnant des personnages/émotions. S'ils peuvent faire rire c'est mieux. Ils ont une répet tous les mardi et ont un match d'impro de temps en temps (à domicile ou à l'extérieur). C'est intéressant de voir ce qu'ils travaillent en répet :

-- Incarner un personnage. Ils doivent apprendre sur thème imposé, à incarner un personnage à la débotté très rapidement (ou une émotion). Ils doivent être très réactif. Ils faut qu'ils trouvent très rapidement une idée, piste, faute de quoi c'est mort.


-- Ils doivent savoir dans leur interprétation donner des perches de rebonds pour les autres membres de l'équipe. Faut de quoi, les autres membres peuvent se retrouver isolés et sans rebonds possible. Ce risque d'avoir des joueurs exclus par un gars qui part sur un trip sans perche, ils appellent ça "le blabla". Ils doivent éviter ça au maximum.

Mine de rien, il y a des points commun avec la pratique narrativiste du jeu de rôle, et on retrouve les mêmes risques. Certains jeux mettent en oeuvre des mécaniques pour éviter ça : sur Guts, un joueur peut claquer des traits d'un autre joueur pour forcer l'interaction, dans Eleusis, c'est le gône et les liens entre perso en commun, sur AW c'est le moteur d'interactions sociales.

Bref, ce point est important à prendre en compte, si le rebond entre joueurs (pire que le MJ arrive pas à rebondir en terme de scène) sur ce que créent les joueurs comme histoire : c'est mort. Les joueurs liés sont moteurs de l'histoire et au centre de celle ci, le MJ est moteur de scène.

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14 Déc 2014 21:12 #42496

Il y a plusieurs techniques ou règles qui viennent effectivement du théâtre d'impro. donc ce n'est pas surprenant de trouver des pts communs entre les deux ;)

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15 Déc 2014 22:55 #42529

Je pense qu'il faut distinguer 3 aspects dans ce que l'on tend à inclure sous le terme "narrativisme".

1) Les règles
Une infinité de systèmes existent, parfois sans dés, parfois même sans règle. Là-dessus, je pense que le système et l'ambiance du jeu vont ensemble. Vouloir appliquer les règles de Rolemaster à un jeu d'enquête n'a pas plus de sens que d'enlever tout jet de dés à X-Corps.
L'utilisation des traits n'est pas nouvelle en soi, et c'est un très bon outil quand le type de jeu (ou l'ambiance souhaitée par le MJ) s'y prête. J'ai déjà eu l'occasion de faire des scénarios sans règles, car le jeu (Conspirations) s'y prêtait très bien.


2) La création du groupe
Pour moi, c'est un sujet distinct du reste. rien n'empêche de concevoir de manière complexe et détaillée un groupe, pour forcer les interactions entre joueurs. J'ai d'ailleurs l'intention d'inclure cela dans mes prochains scénarios suivis.


3) L'absence de scénario
Voilà à mon sens le nœud de mon problème avec le "narrativisme". Autant les 2 sujets précédents se retrouvent déjà volontiers dans le jeu "classique", autant celui-là est plutôt nouveau. Et c'est là que je n'accroche pas, le fait de vouloir faire de l'absence totale de scénario un concept fondamental du jeu. Car je trouve que cela réserve la partie à une élite (les gens dotés d'une imagination et d'un bagout suffisants) et exclut d'office les gens timides ou qui prennent du plaisir à réagir à une situation plutôt qu'à la provoquer.

Là où je n'accroche pas du tout, c'est au fait de poser l'absence de scénario comme un principe. En effet, il est tout à fait possible de faire émerger des moments entièrement issus des joueurs, auxquels le MJ ne fait que réagir, dans une structure de jeu et de scénario complètement "classique". J'en fais la preuve par 3 exemples vécus:
a) Shadowrun avec Sylvain: Le groupe de PJ vit depuis plusieurs scénarios dans un même quartier. Au fur et à mesure des séances, les PJ rencontrent divers PNJ. Au bout d'un moment, au seul énoncé de l'introduction, les joueurs ont inventé toute l'aventure en réutilisant les PNJ et lieux déjà rencontrés.
b) BIA avec Léonard: Pour un test sur un des futurs scénarios du commerce, Léonard a fait l'exercice de style de laisser proposer aux PJ quels indices/oppositions ils souhaitaient lors du déroulement du scénario.
c) Toujours BIA avec Léonard: Un grand moment de roleplay hors contrôle du MJ lorsque mon perso confie les rênes de l'équipe à celui de Didier (parce que moi le joueur, je partais pour 6 mois à l'étranger).

Bref, si j'adhère à 100% aux 2 premiers principes, et vais volontiers les mélanger dans mes prochaines parties, je suis très sceptiques sur le 3), car je n'y trouve quasiment aucun intérêt, et qu'on peut tout à fait le faire à l'intérieur d'un scénario "classique".

Guillaume

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15 Déc 2014 23:21 #42532

Alors attention SandBox ne veut pas dire absence de scénario. C'est plutôt l'inverse et une multiplication des scénarios possibles; Mais leur gestion est différente, c'est ce qu'on appel des fronts.
Chacun s'occupe effectivement de que ce qui l’intéresse mais derrière il y a des groupes, des PNJs qui agissent aussi et à un moment ou a un autre ça va interférer avec les PJs.

Si je reprends ma partie d'AW, on a :

- Une guerre entre les chefs (Ils s'en savent pas plus pour l'instant).
- Des concurrents pour leur vente de drogue (ils en savent pas grand chose non plus).
- Le Maestrom et des choses étranges qu'ils ont provoqué.
- La survie au quotidien, lutter contre le froid, le manque d'espace
- Gérer ses Hommes, son culte, son gang, etc. les ambitions de chacun, les envies, les peurs,
- Ils ont vu des chose étrange.

A l'occasion, je pourrais te monter mes 5-6 fronts avec leurs PNJ, leur Actions, etc... Sandbox ne veut pas dire aucune préparation.

Mais plutôt qu'avoir une liste de scène et de PNJ a rencontré dans un ordre précis de scénario pour désamorcer la situation, pour comprendre, pour en tirer avantage, je n'ai que l'objectifs, les penchants et les actions spéciales de ces groupes. Chaque action des joueurs m'oblige à réagir, a m'adapter, à compléter.

J'ai fait jouer tout une séance comme cela à Yggrasill, en partant uniquement de "Igmar est maudit" et j'ai brodé tout en fonction des propositions des joueurs :
"Est-ce que le monstre avait une tanière ?" "Evidemment !"
"Est-ce qu'il y a des inscriptions dans le grotte ?" "Mais bien sur que oui"
"Est-ce qu'il existe une autre manière de rompre le sorts ?" "Brun' t'es une volva, tu connais bien ce genre de malédiction, il y a quoi comme autre manière de s'en libérer ?"
etc...

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18 Déc 2014 21:20 #42629

un résumé du sujet mieux fait que mes copier-coller à l'arrache :

lesbonsremedes.overblog.com/2014/12/les-...our-vos-parties.html

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24 Déc 2014 14:12 #42807

Il est amusant de voir que, des années après, on retrouve les pseudo-clivage du passé qu'on a pu avoir sur d'anciennes tendances roliste qui "s'opposaient". Mais avant tout, un petit tour d'horizon de ce qu'il a pu exister ...

Podcasts bien sur le sujet :



La scénarisation :

ia700501.us.archive.org/13/items/Romaric..._La_Scnarisation.mp3

Le jdr narrativiste :

ia701200.us.archive.org/3/items/RomaricB...Jeu_NarratifMars.mp3


1 - Donjons et Dragons et sa descendance

Tous le monde connait au moins de réputation ce jeu. Il était essentiellement basé sur un système à niveau, ou le perso montait en niveau et progressait de manière assez mécanique. Le gain de pex fournissait le grain à moudre de la progression, essentiellement basé sur tuer des monstres, et gagner des trésors (PMT quand tu nous tiens ...). Le scénario est souvent assez basique, tout du moins à ses origines.

Il est amusant de souligner qu'à la base Donjons et Dragons, nommé Chainmail, était très orienté stratégie, et arrivé à un certain niveau, le jeu était d'avantage du jeu de stratégie et gestion de ressources qu'autre chose ...

C'est certainement sur cette mouvance qu'on a vu naitre les jeux aux règles les plus complexes (souvenez vous Rolemaster ...)

Jeu emblématique : Donjons et Dragons.
Autres jeux : Rolemaster, l'oeil noir, JRTM ...

Scénario : Très faiblement présent. L'enjeu est très axes sur le donjon et tuer des ennemis ...

Les personnages sont très limité en terme de description et de profondeur, le but est de faire le module. En ce moment il y a une sorte de mode de retour aux sources sur ce type de jeu.

++ Enjeux faciles à comprendre.
++ Evolution facile à mettre en oeuvre.
++ Personnages simples.
++ mécaniques de jeu correctes, souvent épurées et "droit au but".
++ S'adapte bien au one-shot et campagne.
-- Absence de scénario / scène
-- Manque de cohérence d'univers souvent.
-- Enjeux ludiques parfois un peu pauvres.


2 - La mouvance roleplaying

Ce sont les jeux qui sont arrivés par la suite, début années 80. Leur ambassadeur était Greg Stafford (RuneQuest / Pendragon). Sur ce type de jeu, on va centrer le jeu autour du scénario, de ses scènes et situations, sur des univers qui commencent à avoir une bonne cohésion propre.

Jeu "fondateur" : RuneQuest.
Jeu emblématique : L'appel de Cthulhu, Warhammer, Stormbringer, Hawkmoon, Cyberpunk ...

Le nerf de la guerre sur cette mouvance c'est la qualité du scénario, tous repose sur une trame bien pensée, des situations efficaces (on a tendance à oublier ça de nos jours), une bonne intrigue et cohérence ...

Les personnages était globalement assez frugaux en terme d'historique, ils se "faisaient" au fil des scénar. La progression est assez mécanique (tu fais un critiques, tu gagnes des points, tu répartis) et souple (même si on peut discuter de sa cohérence ...).

On a un contrôle fort au niveau du MJ, beaucoup de leviers de narration et mise en scène utilisables pour lui, le MJ peut faire passer des messages etc etc ... Le risque est la non-adhésion des joueurs au scénario et/ou à l'univers. Le recette est donc : un très bon scénario, un système souvent assez simple, du roleplaying moteur, de la prise d'initiative. Le

On a des univers riches mais pas tentaculaires non plus. Des systèmes de règles corrects, sans être exceptionnels non plus (système D100 par exemple).

Un des principal reproche qui était fait à cette tendance à l'époque c'est d'être faiblement centrée sur les envies des joueurs/personnages, tant et si bien que leur importance se limite à la pertinence de leurs stats au regard du scénario. On est loin de s'intéresser à l'aboutissement/accomplissement des personnages.

Pour autant ce type de pratique garde de très forts atouts, je pense en particulier à toute les ficelles de scénarisation à "effet spectaculaire" et à l'énorme capacité qu'à le MJ de pouvoir passer des massages et laisser des images/impressions.

++ Tout le personnage est exploité, personnage simple.
++ Evolution facile à mettre en oeuvre.
++ scénario et moteur de situation/roleplaying.
++ Gros terrain d'expérimentation scénaristique (one-shot originaux). Grosse fraicheur.
++ mécaniques de jeu correctes, parfois un peu lourde.
++ S'adapte bien au one-shot.
-- Personnage à faible importance. Il ne se construit que au fil des scénar/actions.
-- Intégration personnage/scénario parfois bancal.
-- Enjeux ludiques parfois un peu pauvres.
-- Système de règle peu originaux, parfois mal adapté à l'univers et/ou aux personnages mal servi.
-- Peut-être dur à adapter sur de la campagne/chronique.

Propice à la scénarisation type "toboggan" (linéaire ou pas voir podcast scénarisation).


3 - La mouvance storytelling

Cette mouvance est apparue par opposition au Roleplaying, et du constat que ce dernier ne tourne que trop peu autour des personnages (envies, émotions, motivations, background). On centre à présent le jeu sur les personnages le scénario n'est qu'un outil que le MJ doit déployer pour servir les motivations des joueurs. Le joueur ne subit plus (du moins à priori).

Jeu "fondateur" : Ars Magica.
Jeu emblématique : Vampire, Loup Garou, dans une sous catégorie jeu initiatique, Hurlement et Scales, d'une certaine manière Nephilim aussi.

C'est sur ces jeux que l'on a découvert les systèmes à "vertus/défauts" pour faire des personnages extrêmement fouillés et profonds. C'est extrêmement plaisant de jouer des personnages profonds, mais ça a un prix sur la mise en scène. En effet on a souvent des apartés et ruptures de rythme en partie très pénalisant, voir des joueurs qui ont des intérêts antagonistes.

Ces jeux ont souvent un background tentaculaire et extrêmement riche, mais c'est aussi ces jeu qui proposent les systèmes de règles les plus pourris. La recette est simple : le joueur manifeste ses envies et orientations, le MJ bâti des trames et pistes voir scénarisation en cohérence avec un "background gentes large". Cela demande un énorme boulot de préparation et suivi pour le MJ, avec souvent très peu d'outil de suivi, ou un outillage trop complexe et lourd (Ars Magica). Les jeux dit "à secret" ou initiatique sont très souvent dans cette catégorie.

Les orientations scénaristiques/objectifs sont à l'initiative du joueur, la narration reste au MJ, à tel point que dans certain jeu il est appelé le conteur.

C'est sur ces jeux que j'ai vu l’enthousiasme le plus fort, mais aussi la lourdeur la plus marqué, que ce soit à cause de la "mise en scène partagée" et de la nécessité de suivi délicate, que parfois du manque de pragmatisme des joueurs très centrés sur eux-mêmes et confrontés à une sorte de mutisme face à du BG complexe, provoquant un enlisement certain. C'est aussi sur ces jeux que j'ai vu de l'impro de MJ la plus foireuse. Bref, la perte en fraicheur de jeu, scène marquantes etc etc est notable.

Enfin, le suivi et l'évolution des joueurs, c'est souvent très lourd. Déjà ne doutez pas que 8 séances plus tard, le MJ ne se souvient pas de tous les personnages, du coup, ils sont vraisemblablement exploité à moins du tiers de leur historique. Les systèmes d'évolution sont souvent très très lâches et en pratique très dur à la mise en oeuvre, tant et si bien que les joueurs deviennent ou très vite gros bill, ou n'évoluent presque pas (le tout couplé à un système souvent mal équilibré).

++ Personnage ultra profond plaisant à jouer.
++ Univers ultra riches et profonds, confortable pour le MJ et passionnant pour les joueurs.
++ Intrigues et mise en scène centrée sur les objectifs et actions des joueurs
++ Expérimentation sur l'historique et interactions d'historiques des joueurs.
++ Ultra adapté à de la campagne/chronique.
++ Univers riche implique une immersion facilitée.
-- Systèmes de règles souvent foireux/bancals.
-- Intégration de groupe faible, parfois antagoniste, apartés nombreux et rupture de rythme
-- Prise en compte au global de chaque joueur difficile. Système de progression absent ou trop lourd donc au final pas mis en oeuvre, frustration.
-- Perte en pragmatisme et fraicheur.
-- Gros travail du MJ
-- Affaiblissement du situationnel/scénarisé au bénéfice d'impro parfois foireuse autour de ce que veulent les joueurs (si le BG est mal maitrisé par le MJ essentiellement).
-- Peu d'intérêt en one-shot.

Propice à la scénarisation type "bac à sable" (voir podcast scénarisation).


4 - La mouvance narrativiste

Très en vogue en ce moment, surtout dans le jdr indie, elle nous vient du monde du théatre d'improvisation, et propose de mettre en oeuvre de l'inversion de contrôle radicale. La narration est entre les mains du joueur, il dispose d'un système (traits, interactions sociales etc etc ...) qui permet à ce dernier de "raconter l'histoire". Lorsqu'un film ne vous plait pas vous changez de chaine. Le narrativisme c'est la zappette du jdr.

On est sur des mécaniques de systèmes de jeu très différentes des précédentes. Tout est mis en oeuvre pour que le système permette au joueur de "créer de la narration, scènes, évènements". Fini les systèmes de compétences lourds, on va droit au but avec des verbes et traits très imagés que l'on peut claquer pour créer du "jeu à la volée" en séance. La ou les autres mouvance proposent des règles dont le but est simuler, en narrativisme, les règles servent à "raconter l'histoire", c'est très différent.

Dans les systèmes les plus "soft" les joueurs ont des traits qu'ils peuvent claquer (eux même ou en interaction avec ceux des copains), les systèmes les plus représentatifs sont FATE et Cortex, on a malgré tout un univers et/ou des bases de scénar.

Dans les cas les plus extrêmes, il n'y a ni scénario, ni univers on a seulement un moteur d'interaction (les règles). On est dans du sandbox pur (Apocalypse World, le jeu que Didier nous avait proposé, Everway ...).

Le seul rôle du MJ est rebondir pour envoyer des scènes et conséquences, réguler.

Jeu "fondateur" : Everway.
Jeu emblématique : Apocalypse World, Small world, On Mighty Thews, Eleusis, Cabaret, Guts ...

On observe cependant de plus en plus de jeu typé Roleplaying qui enrichissent leur moteur par un moteur narrativiste (L'anneau unique, Chronique des Féals, Cobra ...), en particulier sur les jeux pulp qui usent et abusent du moteur FATE.

Le fait d'inverser le contrôle et de centrer les évènements dynamiquement sur le jeu des joueurs est très fécond en terme de possibilités de systèmes de règles. Chez nos amis les narrativistes, on se creuse vraiment la tête sur les règles et on sort des règles super bien fichues. On comprend bien que le nerf de la guerre c'est ... de bonnes règles qui servent le joueur, la narration et la dynamique. Très facilement on peut imaginer des idées de systèmes de règles qui peuvent tous potentiellement marcher.

L'autre gros point fort, c'est que l'historique et le BG du joueur est instrumenté par des traits/aptitudes. Du fait, tout le personnage est "joué", et on est pas dans une situation ou une partie du BG du perso passe à la trappe (cf vertues et défauts). Les systèmes permettent aussi une très bonne gestion de l'évolution des personnage.

Même si à priori le joueur à une énorme liberté, cette pratique n'est pas exempt de risques. Dans le monde du théâtre d'improvisation il y a deux écueils majeurs à éviter pour les improvisateurs : l'absence de personnage/concept/émotion et ce qu'ils appellent "le blabla".

Le premier, c'est de ne pas arriver à avoir un personnage joué (identité, personnalité, ou ... juste une émotion/concept), et du coup avoir un roleplay/jeu/improvisation fade.

Le deuxième est de partir sur des éléments de narration (bref créer de l'histoire) qui exclus des acteurs (donc pour nous des joueurs). Il peut très bien y avoir deux joueurs qui partent dans leur délire et interaction, et qui ne tendent aucune perche à d'autres joueurs de la table qui du coup se retrouvent exclus.

Alors biensur, partant de là, les jeux essayent de proposer un maximum d'outillage pour éviter ça (moteur de relations sociales, traits à claquer chez les autres, défauts jouables etc etc ...), mais malgré ça, c'est pas gagné

Enfin le dernier risque est que les joueurs n'amorcent pas, le tout couplé à une absence de scénario/univers génèrent une mort précoce du jeu. Ce qui est également à noter c'est que l'absence de MJ mets hors jeu certains éléments qui en jeu de rôle sont très puissant pour faire de super choses : le situationnel, et le message.

Quoi qu'on en dise, la difficulté est renvoyée aux joueurs, et on attend d'eux beaucoup de réactivité, bagout, idées et surtout bienveillance pour pas enfermer d'autres joueurs. C'est une pratique qui met rapidement en grosse difficulté le joueur débutant.

++ Inversion de contrôle, le joueur est au centre de la narration/scénarisation/univers.
++ Grosse liberté pour les joueurs. Les joueurs font ce qui leur plait - accomplissement facilité.
++ Très bons systèmes de règles, très bonne prise en compte des particularismes joueurs et de leur évolution.
++ Beaucoup d'innovation et expérimentations possibles sur le système de règle.
++ Adapté en one-shot et campagne.
-- Risque de "blabla" et d'exclusion. Risque de la "non amorce". Difficile pour le joueur. Tout repose sur lui.
-- Perte définitive du moteur situationnel et de la possibilité de passer des messages/image/émotions par le MJ.
-- Difficulté à cerner un personnage/concept/émotion au niveau PJ.
-- Risque d'avoir des séances flasques, absence de scénar travaillé. Parfois on fait une croix sur l'univers (et tout ce que ça implique).
-- Faible possibilité d'anticiper pour le MJ, nécessité de rebondir "in situs".
-- Roleplay supplanté par des mécanique du système pour faire du narrativisme (aspect théatral un peu perdu). Perte potentielle de "jouer un rôle" et donc du roleplaying.
-- Risques d'essoufflement sur de la campagne malgré tout.
-- l'absence d'univers peut rendre difficile le processus d'immersion pour le joueur.


Je pense que toute ces visions sont en réalité très complémentaires. Là ou certaines sont très fortes, d'autres sont beaucoup plus faible et réciproquement. Cela reste des outils à avoir pour servir ce qu'on fait.

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24 Déc 2014 18:02 #42815

Podcast sur le sujet à écouter ici :
www.lacellule.net/p/podcasts.html

Site que j'ai connu grâce à Casus Belli ...

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28 Déc 2014 16:52 #42847

Bien ce site de podcast ... Sur le podcast sur le narrativisme :

Effectivement, l'argument clé des "narrativistes" c'est de dire "Les anciens rolistes font de la simulation, la ou nous on fait de la narration, la simulation ne fait pas avancer l'histoire".

Je suis assez d'accord avec ce que dit le gars, séparer les deux approches est une connerie, pourtant il y a clairement une tendance clivante des narrativistes, c'est bien d'avoir discerné la codification de simulation et de narration, mais attention à ne pas séparer.

Le podcast ne souligne pas par exemple, par analogie avec l'origine du narrativisme (le théatre d'improvisation), le rôle de l'arbitre. C'est évoqué à un moment sur la conf, quand il parle du rôle du meneur sur des jeux narrativistes extrêmes. L'arbitre dans le théâtre d'improvisation, c'est de siffler les fautes et le hors jeu, c'est tout. En gros c'est lui qui va mettre des pénalités si un joueur fait du "blabla". Les fautes sont formelles, formalisées et identifiées clairement. Il réparti aussi qui prend la parole etc etc ...

Ce qu'il décrivent comme étant le storytelling, non c'est globalement faux ce qu'ils disent. Le storytelling c'est bien ce que j'ai dit plus haut. Effectivement, le fait que l'univers est souvent très fort sur ces jeux là donne un rôle de compteur au MJ très fort, mais à l'époque c'était déjà une volonté de recentrer les scénario et la scénarisation sur les personnages.

La forte tendance à travailler les règles pour en faire des règles de narration (et pas de simulation) jette des ponts évidents entre le jdr et le jeu de plateau.

Mais je trouve que ce genre de discussion ... ils restent très théoriques. Ca manque de retour sur pratique, interprétation et tripes et au final ... d'artistique. Ca codifie énormément.

Ce qui est très délicat comme dit sur la conférence (ou sous-entendu) c'est la difficulté des impacts de la simulation sur le système de narration, si on sépare complètement (et réciproquement).

La voie médiane dont il parle entre le jdr traditionnel et jeu narrativiste (tirage de carte) : je pense à Torg et Chimère.

Ils évoquent une autre dichotomie très intéressante : est ce que c'est les actions (et donc leur résolution) et quelque-part les actions qui doivent faire l'histoire (démarche concrète de la vie de tous les jours je dirais), ou est ce que l'histoire doit-être faite par la narration (démarche roman, théatre d'impro). Vaste débat.

Un petit podcast de Mathieu Gaborit ...

ia600702.us.archive.org/22/items/Romaric...hieu_GaboritSept.mp3

On voit bien que chez Multisim, le système de règle on s'en carre ... Ce qui explique les systèmes pourris de Nephilim, Agone, Guildes etc etc ...

Pascal

P.S : c'est hyper théorique leur truc, c'est à se demander s'ils jouent ces gars.

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29 Déc 2014 18:57 #42869

C'est de la théorie et ce n'est pas forcement nouveau, c'est plutôt des "best pratice" qui vient de l'expérience des MJ/Auteurs.
On se rend compte que l'on doit penser à l'objectif, au style de jeu que l'on veut faire au moment de sa création et aussi le faire comprendre aux lecteurs (encore plus dur).

La logique derrière est différente entre les approches :

Dans un jeu simulationniste : Je veux crocheter une serrure, c'est une serrure complexe et renforcé Magiquement : Diff 35.
Je rate : Il se passe rien. MJ bien embêter, il faut forcement passer pour finir le scénario.. relance le jet pour retenter.
Je réussis : Le groupe passe l’obstacle, le scénario continue.
ne me dite pas que ça vous arrive jamais que ça soit un jet de perception, de crochetage, de persuasion, etc..

Dans un jeu narratif : Je veux crocheter une serrure, c'est une serrure complexe et renforcé Magiquement (c'est la même difficulté qu'une cabane, on s'en fou)
1) c'est obligatoire pour la suite ? C'est réussite auto.
2) L’échec est intéressant, il y a un enjeu ? Si c'est Non, réussite auto.
3) Je rate : Conséquence, j'ouvre mais déclenche le système d'alarme, les gardes arrivent, je laisse des traces, j'abîme mes outils, etc..
4) Je réussis : Le groupe passe l’obstacle, le scénario continue.

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